Page:Duchaussois - Aux glaces polaires, Indiens et Esquimaux, 1921.djvu/77

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éléments déchaînés. Dire où nous allons, personne ne le sait ; mais nous marchons toujours.

Après plusieurs heures de course au milieu de cette furieuse tourmente, il nous sembla que sa violence diminuait ; puis nous crûmes voir une masse d’ombre flotter au sein des tourbillons de neige. Ne serait-ce pas la terre ?… Oui, c’est elle ! Deo gratias !

Où sommes-nous ? Félix regarde la côte à droite, à gauche, aussi loin que sa vue peut porter, et déclare ne pas s’y reconnaître. Nous examinerons cela tout à l’heure. En attendant, chauffons-nous, dégelons-nous et réconfortons-nous un peu. Nous en avons besoin. Nous n’avons pas la chance des enfants de la fournaise à Babylone, lesquels passèrent par le feu sans en ressentir les ardeurs. Nous avons subi les rigueurs des éléments tout à fait opposés, et nous n’en avons pas moins le visage couvert de brûlures. Pas un nez indemne, pas une joue intacte. Félix surtout, qui n’a pas de barbe, a littéralement la face en compote. Heureusement, ces morsures du froid ne sont pas profondes, l’épiderme seul en est affecté, et l’on en sera quitte pour faire peau neuve.


Dans un bourrelet du Grand Lac des Esclaves.

Comme Mgr Grouard n’avait, lors de cette aventure, que des lacs de dimensions moyennes à rencontrer, il s’était contenté de son équipage. Mais les missionnaires qui doivent braver les grandes étendues du lac Athabaska et du Grand Lac des Esclaves ne partent jamais seuls.

Même en caravanes, ils peuvent être jetés en d’extrêmes périls. Ce fut le cas de Mgr Grandin, la nuit du 14 au 15 décembre 1863, sur le Grand Lac des Esclaves.