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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/189

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térêt bien entendu d’une noblesse intelligente qui aurait su faire, ce qui l’aurait relevée et justifiée aux yeux du pays, des sacrifices devenus nécessaires, cette même ambition n’était pas davantage hostile, nous l’avons montré, aux prérogatives de la royauté. L’idéal des Encyclopédistes, c’est, en somme, l’idéal des légistes, dont ils reprennent et poursuivent, à leur point de vue, l’œuvre plusieurs fois séculaire ; car ici encore, cette raison des philosophes, qu’on a tant accusée d’être en conflit avec la tradition nationale, ne fait au fond que la continuer. Les Encyclopédistes, disions-nous tout à l’heure, ne sont pas des révolutionnaires à l’égard de la royauté ; nous pouvons ajouter qu’ils ne le sont pas davantage par rapport à la marche et au sens même de l’histoire de France : à partir, en effet, de l’affranchissement des communes, c’est avec l’aide du Tiers-État, on le sait, que la royauté se fortifie aux dépens de la noblesse et fonde ainsi l’unité nationale. Mais si les nobles, au dix-huitième siècle, ont perdu leur prépondérance politique, ils gardent encore leurs privilèges sociaux ; que ces privilèges soient, sinon supprimés, du moins atténués dans ce qu’ils ont de trop choquant, c’est tout ce que demandent les Encyclopédistes et, en cela, ils font ce qu’ont fait leurs pères du Tiers-État, lesquels furent, comme on sait, bien moins soucieux de liberté que jaloux d’égalité. À la royauté maintenant de continuer l’œuvre d’affranchissement commencée de concert avec la bourgeoisie : « Que le roi parle en maître », c’est un mot de Diderot, « comme le savait si bien, ajoute-t-il, Henri IV (le roi préféré des Encyclopédistes), mais qu’il n’oublie pas « la poule au pot » pour le peuple, c’est-à-dire : que le roi soit tout puissant, mais qu’il se serve de sa puissance pour réduire au droit commun une noblesse qui, « démantelée » et déchue, ne saurait être un solide appui pour la couronne ; car, qu’a-t-elle gardé de son ancienne splendeur ? tout juste ce qu’il faut d’exemptions et de faveurs injurieuses pour humilier et exaspérer le bourgeois et l’homme du peuple. Que tout soit peuple désormais pour la royauté, et celle-ci peut