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Page:Ducros - Les Encyclopédistes.djvu/193

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qu’une évolution historique et comme une nouvelle étape franchie par cette opinion qui s’annonce dans l’Encyclopédie et aboutit, de progrès en progrès, aux cahiers des États. Y a-t-il, en outre, et c’est là ce qu’il importerait de déterminer, un lien logique entre les articles de l’Encyclopédie et les fameux cahiers et peut-on dire que les premiers ont, trente ans à l’avance, comme suggéré et préparé les seconds ?

On se rappelle, d’une part, toutes les réformes sociales si expressément réclamées par l’Encyclopédie et l’on a vu, d’autre part, que ces réformes, c’est à l’État, c’est-à-dire au roi que l’Encyclopédie les a demandées. Mais si le roi trompe l’attente des philosophes, si le despote n’est pas bon et se refuse à faire le bonheur de ses peuples, tel du moins que les philosophes le comprennent, quel parti prendront les philosophes ? Nous le savons, leur parti est pris et comme annoncé d’avance dans leurs écrits : la bonté, c’est-à-dire le dévouement au bien public fondant seul à leurs yeux et légitimant le pouvoir du roi d’après un contrat tacite conclu entre ses sujets et lui ; si le roi n’est pas bon pour le peuple, il déchire lui-même le contrat social et il rend à ses sujets malheureux le droit de s’aider et de se sauver eux-mêmes ; « si les hommes, en effet, se sont mis en société, c’est seulement pour être plus heureux[1]. Dans certains pays, les monarques exercent, du consentement des peuples, un pouvoir absolu ; mais il est toujours subordonné aux lois fondamentales du royaume qui sont la sûreté réciproque du souverain et des sujets. Quelque illimité que soit le pouvoir du souverain, il ne lui permet jamais d’opprimer le peuple, de fouler aux pieds la raison et l’équité[2]. » Et d’Holbach, toujours plus explicite que l’En-

    daignassent pas de consigner, dans des productions éphémères et diversifiées, les vérités qu’un public frivole saisissait avec avidité dans une brochure piquante, tandis qu’elles seraient restées éternellement enfouies dans de gros volumes… Une nuée de brochures inonda tout à coup la France et les discussions les plus importantes du droit public passèrent rapidement dans toutes les bouches. » (Archives parlementaires, I, 563).

  1. Encyclop., art. Souverain.
  2. Ibid., art. Pouvoir.