Page:Dufay - Eugène Hugo, sa vie, sa folie, ses œuvres, 1924.djvu/156

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cris de détresse. La tête du Saxon se rejette en arrière ; il chancelle, le pied lui manque, ils vont tomber.

Épargne-moi, crie-t-il au vaincu. Regagne la terre, répond le Danois. Et le Saxon s’avance, aveuglé par le sang ; il marche à pas lents, suspendu sur l’abîme, tenant toujours entre ses bras son ennemi, qui le guide.

Enfin il a franchi l’abîme ; il a mis le pied sur la terre, ils sont sauvés. Tout à coup, emporté par la douleur, il se retourne et veut lancer son ennemi dans le gouffre. Meurs, s’écrie le Danois. Il le frappe ; le Saxon frappé chancelle ; il tombe et il entraîne le Danois avec lui.

Ils roulent, ils roulent de roc en roc. Bardes, chefs, soldats, tout est accouru sur le bord du précipice. On les voit se saisir, se frapper, se combattre encore. Tout-à-coup ils arrivent à un endroit où le roc est à pic, ils disparaissent, et on entend leurs corps se briser sur un rocher qui s’avance en esplanade au-dessus du torrent.

Ils restent quelque temps sans mouvement ; peu à peu on voit les cadavres se ranimer et se chercher encore à coups de poignard. Arrêtez ! criaient les Senécions, les Senécions dont l’aspect doit être assez puissant pour faire rentrer au fourreau les glaives déjà tirés ; vaines clameurs : ils se roulent. Tout à coup, chose horrible ! un ours énorme sort de dessous