Page:Dufay - L’Impôt Progressif en France,1905.djvu/446

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On a pu constater que son ambition est facilement satisfaite ; il est assez riche du peu qu’il possède par son travail. Si notre société présente un certain danger au point de vue économique, on le rencontre plutôt dans l’insatiable avidité qui se trouve toujours pauvre des millions qu’elle n’a pas encore.

Ce sont les possesseurs des énormes fortunes qui vont opposer, tout naturellement, la plus énergique résistance à la réforme ; ils répéteront cet argument au moyen duquel ils l’ont plusieurs fois fait ajourner, que la progression de l’impôt est une attaque au principe même de la propriété ; ils ne se doutent pas qu’on leur oppose, à bien plus juste titre, que c’est au contraire la progression indéfinie de la fortune par la spéculation et l’usure qui est le plus fort argument contre ce même principe. C’est être, à mon avis, sagement conservateur, que de supprimer l’une des raisons sans cesse invoquées par le collectivisme contre la propriété individuelle. Limiter cette propriété, ce n’est pas la supprimer, c’est, au contraire, la généraliser, c’est en faire le terrain solide sur lequel repose la société.

Quant à l’exécution, à la mise en œuvre de la réforme, elle sera plus facile en France qu’elle ne l’a été dans les autres États. Ils ont eu à créer, à inventer, en quelque sorte, les formules, à procéder par voie de tâtonnements. Nous n’aurons même pas ce souci ; il est facile de choisir ce qui conviendra le mieux à notre état social, à nos traditions, même, si l’on veut, à notre esprit de routine, dans les trente-deux législations fiscales de l’Angleterre, de la Prusse, de l’Autriche, de l’Italie, de la Suède, des