Page:Dufay - L’Impôt Progressif en France,1905.djvu/534

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ne toucherait jamais qu’une part du revenu absolument superflue, et qui se convertit aujourd’hui en un nouveau capital, venant augmenter encore la fortune déjà trop considérable de ceux qui la possèdent ou plutôt qui en sont possédés ?

Il est si vrai que c’est la petite propriété qui fait la valeur de la grande, qu’actuellement, au nord de l’Italie, et notamment dans la belle vallée de la Dora-Baltea, en Piémont, la valeur du sol a triplé depuis que de simples ouvriers, revenant dans leur pays, la bourse garnie de quelques rouleaux d’or, gagnés en France, peuvent acheter à des prix infiniment supérieurs à ceux d’autrefois, des parcelles de terre détachées des grands domaines. Et à quelle cause les gens du pays attribuent-ils cette valeur extraordinaire du sol, si ce n’est à la faiblesse des impôts atteignant aujourd’hui en Italie les petits revenus, et davantage les grands revenus, favorisant aussi le développement de la population, à tel point que l’Italie, tout en augmentant considérablement en nombre, expédie à l’étranger trois cent mille émigrants chaque année ? Notre système fiscal est si contraire au bon sens et à la raison que nous sommes obligés de recourir à ces étrangers pour faire à meilleur compte la plupart de nos travaux que nos petits propriétaires ne pourraient plus supporter, s’il fallait recourir au travail français, plus coûteux ; en sorte que ce qui reste de richesse chez nous passe en partie la frontière, pendant qu’une autre partie importante, produite par le travail, est absorbé par les impôts sur la terre, et par l’intérêt ou l’usure du capital argent de plus en plus concentré en quelques mains.