Page:Dufour - Étude sur l’esthétique de Jules Laforgue, 1904.djvu/19

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listes, l’idéal plastique. Et aboutissant au même résultat que Winkelmann, l’antique, — vous trouvez que c’est l’athlète de la vie grecque. Cherchez-le, au contraire, par les voies du plaisir de l’œil, et on arrive à voir qu’il n’est pas d’idéal absolu, mais relatif. Un ivoire japonais, une orfèvrerie de Cellini, un pied-bot de Vélasquez, la Bethsabé de Rembrandt, un tapis persan, un nocturne de Whistler, donnent un plaisir artistique à mon œil, en dehors de tout attrait archéologique, littéraire ou de rareté. » — Considéré du point de vue de la vie, continuée à travers les âges et les civilisations, le chef-d’œuvre de la floraison hellénique n’est ni plus ni moins éphémère « que le héros de noblesse morale et de perfection physique d’une estampe de Deveria, — Byron ou Lamartine. L’Antinoüs n’est pas plus beau que le duc de Morny, la Junon de la villa Ludovisi qu’une Parisienne d’un pastel de Nittis. Le dandysme, cette beauté de l’être en toilette, la correction de l’homme, l’art de la femme, cela avec nos visages si expressifs, n’est-il pas aussi intéressant, aussi solide, aussi humain, aussi naturel que le nu grec » ?

Pour Renan, qui adopte le même idéal que Taine, le règne de la statuaire aurait pris fin du jour où l’on a cessé d’aller à demi nu. Un changement, il est vrai, s’est, à cette époque, produit dans la sculpture. L’historien le constate ; l’amateur s’en réjouit, toujours épris de nouveauté. Mais, d’abord, de quel droit dites-vous que c’est une décadence ? Ne suis-je pas, moi, aussi fondé à dire que c’est un progrès ? Décadence, progrès, que signifient ces mots au regard de la vie ? — « Seul,