Page:Duhamel - La Vie des martyrs.djvu/140

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aussi des débris humains et leur assurait une sépulture convenable.

Ainsi, nous n’étions pas là seulement pour soigner les vivants, mais aussi pour honorer les morts. Le souci de ce qu’on appelle pompeusement leur « succession » incombait à S… notre administrateur. C’est lui qui recueillait dans un petit sac de toile tous les papiers et menus objets ayant appartenu aux victimes. Il consumait ses journées et ses veilles dans une bureaucratie funèbre, et inévitable même sous le feu de l’ennemi. Sa besogne n’était d’ailleurs point exempte de certaines difficultés morales, c’est ainsi qu’il trouva dans les poches d’un cadavre une carte de femme qu’on ne pouvait absolument pas faire parvenir à la famille, et, une autre fois, une collection de chansons telles qu’après conciliabule on décida de les brûler…

Purifions la mémoire des martyrs !


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Nous eûmes à soigner plusieurs blessés allemands. L’un d’eux, à qui je dus couper une cuisse, me prodigua, dans sa langue, toutes sortes de re-