Page:Duhamel - La Vie des martyrs.djvu/165

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déjà bien des liens, et, en cela, il meurt un peu.

Avec une inquiétude voilée, je dis doucement, comme si je posais une question :

— C’est toujours une bonne chose que de manger, de boire, de respirer, de voir la lumière…

Il ne me répond pas. Il rêve. J’ai parlé trop tôt. Je m’en vais avec mon inquiétude.


*


Il y a encore de durs moments, mais la fièvre tombe peu à peu. J’ai l’impression que Léglise supporte la douleur avec plus de résolution, comme quelqu’un qui a donné tout ce qu’il avait à donner, et qui ne craint plus rien.

Le pansement fini, je le tourne sur le côté, pour soulager son dos malade. Pour la première fois, ce matin, il a souri en disant :

— J’ai déjà gagné quelque chose à être débarrassé de mes jambes ; je peux me coucher sur le côté.

Mais il tient mal en équilibre : il a peur de tomber.

Pensez à lui, et vous aurez peur pour lui, avec lui.