Page:Duhamel - La Vie des martyrs.djvu/219

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cordes et descendent le corps en se querellant à voix sourdes, car ce n’est pas si facile qu’on pourrait le croire d’être fossoyeur : il faut le coup de main ! Et la nuit est fort noire et la boue bien gluante.

Enfin le cadavre est au fond et l’on retire les cordes grasses de terre. Sur le remblai, le petit prêtre étique murmure la prière des morts. La pluie nous fouaille le visage. Démon familier de l’Artois, le vent bondit dans les vieux arbres. Le petit prêtre murmure les paroles terribles : Dies iræ, dies illa…

— Et ce jour même, n’est-il pas celui de la colère ? Moi aussi je prononce ma prière : « Au nom du monde malheureux, pauvre Bride, je te remets tous tes péchés, je t’absous de toutes tes erreurs ! Que ce jour, au moins, soit le jour du repos ! »

Le petit prêtre est tête nue dans la bourrasque. Au-dessus de sa tête, un infirmier qui est un ecclésiastique étend un bout de tablier. Un homme élève le falot à la hauteur de son œil. Et les gouttes de pluie s’éclairent et étincellent furtivement.

Bride est mort…