Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/31

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réelle au sein des sphères des astres, sphères à l'intérieur desquelles ils sont donnés. »

Si ces excentriques et ces épicycles, si les mouvements par lesquels les astres les parcourent sont de pures conceptions de l’esprit, comment seraient-ils les seuls mouvements réels et véritables, tandis que les mouvements observés ne seraient que des apparences ? Ceux qui le prétendent « oublient que ces cercles sont seulement dans la pensée ; ils font des échanges entre des corps naturels et des conceptions mathématiques ; ils donnent les causes des mouvements naturels au moyen de choses qui n’ont point d’existence en la nature[1] ».

Prendra-t-on le second parti ? Déclarera-t-on que les excentriques et les épicycles ne sont point de simples conceptions de l’esprit, mais des corps physiquement réalisés en l’essence céleste ? Ceux qui raisonnent ainsi se heurtent à des impossibilités : « En admettant, en effet, que les mouvements irréguliers des astres sont véritablement produits par ces cercles, que ceux-ci ont une existence réelle au sein des cieux, ces astronomes détruisent la continuité des sphères en lesquelles se trouvent ces cercles qu’ils meuvent les uns dans un sens, les autres en sens contraire, et ceux-ci suivant une autre loi que ceux-là. »

Les combinaisons de mouvements proposées par les astronomes étant de pures conceptions, dénuées de toute réalité, elles n’ont pas à être justifiées à l’aide des principes de la Physique ; elles doivent seulement être disposées de telle sorte que les apparences soient sauvées. Les astronomes « ne concluent pas les conséquences à partir des hypothèses, comme l'on fait dans les autres sciences ; mais prenant les conclusions pour point de départ, ils s'efforcent de construire des hypothèses desquelles résultent nécessairement des effets conformes à ces conclusions. — Οὑκ ἀπὸ τῶν ὑποθέσεων τὰ ἑξη̂ς συμπεραίνουσιν, ὡσπερ αἱ ἄλλαι επιστήμαι, ἀλλʹ ἀπὸ τω̂ν συμπερασμάτων τὰς ὐποθέσεις ἐξ ὡ̂ν ταυ̂τα δεικνύναι ἔδει πλάττειν ἐγχειρου̂σι ».

  1. Le texte dit : ἐκ τῶν ἐοὶκούντων ἐν τῇ φύτει ; visiblement, il faut lire : οὑκ οἰκούντων.