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L’ASTRONOMIE DES SÉCULIERS


deviendrait exact, du moins si la longueur véritable de l’année est celle qu’admet Ptolémée.

» Mais, selon Albatégni, la véritable durée de l’année est inférieure d’un centième de jour à la durée admise par Abrachis et par les créateurs du calendrier ; dès lors, pour la même raison que précédemment et selon l’hypothèse d’Albatégni, si de cent années de notre calendrier, on retranchait une journée, au bout de ces cent années, il y aurait retour du Soleil à son point de départ. »

Robert Grosse-Teste donne alors une description sommaire du mouvement oscillatoire que Thâbit ben Kourrah attribue à la huitième sphère [1] ; puis il ajoute : « Si l’on attribue aux étoiles et au Soleil un mouvement de cette sorte, la durée de l’année ne se déterminera pas par le retour du Soleil au même équinoxe ou au même solstice, mais par le retour du Soleil à la même étoile fixe ; la durée de ce dernier retour, en effet, est toujours la même ; tandis que selon cette hypothèse, le temps que met le Soleil à revenir au même équinoxe ou au même solstice n’a pas une durée invariable ».

C’est à ce passage sans doute que faisait allusion Campanus de Novare lorsqu’il écrivait en son Computus major [2] : « L’écliptique fixe n’est donc pas le cercle que le Soleil décrit en son mouvement propre, ainsi que l’a dit, dans son Computus, cet homme digne de tout respect qu’est Robert, Evêque de Lincoln ; c’est un cercle de la neuvième sphère qui est incliné sur l’équateur de 22°33’30" environ ».

La phrase de Campanus est ambiguë ; elle dit : « Unde orbis signorum fixus non est circulas quem describit Sol motu proprio ; quemadmodum scripsit in computo suo multæ reverentiæ vir Robertus Linconiensis épis copus, sed est unus circulas major in nona sphæra… » Cette phrase pourrait être prise pour un reproche ; elle accuserait Robert Grosse-Teste d’avoir regardé comme trajectoire du Soleil l’écliptique fixe, et non pas l’écliptique mobile. Cette accusation serait pleinement injuste ; l’Évêque de Lincoln a très nettement distingué [3], selon la doctrine de Thâbit,

1. « Ce mouvement de la huitième sphère, dit Robert Grosse Teste, est très lent ; en 30 années arabes, les têtes des constellations mobiles du Bélier et de la Balance décrivent seulement, sur les deux petits cercles dont il a été question, un arc de 2° 34′ 58″.» En son Compendium Sphœrœ, il avait écrit de même que ce mouvement « est de 1° 2′ environ en douze ans ». Ces deux nombres sont extraits des tables qui, dans plusieurs manuscrits, sont insérées à la fin du traité De motu octaves sphœrœ, attribué à Thâbit ben Kourrah.

2. Campani Novariensis Computus major, cap. X.

3. Ms. cit., fol. 90, col. c.

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