Aller au contenu

Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/293

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
286
L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


plus basse, en effet, est une sphère, plus est faible, plus est impure la lumière corporelle primivitive qui se trouve en elle.

» Bien que les éléments participent à la forme du premier ciel, le moteur du premier ciel ne leur communique pas, cependant, le mouvement diurne ; quoiqu’ilsparticipentàlalumièreprimitive, ils n’obéissent pas, toutefois, à la vertu motrice du premier orbe ; cette lumière, en effet, ils ne la possèdent qu’impure, affaiblie, pt bien éloignée de la pureté de la lumière qui émane delà première sphère ; en outre, ils ont la densité de la matière, qui est une densité de résistance et de désobéissance.

» Toutefois, quelques-uns pensent que la sphère du feu tourne par l’effet du mouvement diurne ; comme marque de cette assertion, ils donnent le mouvement de circulation des comètes [1]. Ils disent encore qu’une dérivation de.ee mouvement parvient jusqu’aux eaux de la mer, en sorte que le flux des mers résulte de ce mouvement. Mais tous ceux qui philosophent bien (omîtes recte philosophantes) disent que la terre est exempte de tout mouvement.

» De même en est-il des sphères qui se trouvent après la seconde sphère, après celle qu’on nomme la huitième lorsqu’on les compte de bas en haut ; toutes ces sphères inférieures participent également de la forme de cette huitième sphère ; elles communient donc toutes au mouvement de cette sphère, à celui qu’elle possède en propre, en sus du mouvement diurne. »

Cette doctrine cosmogonique s’enchâsse de la plus heureuse manière dans le cadre des théories physiques de Robert de Lincoln ; la lumière, en effet, et les lois selon lesquelles elle se propage, tiennent le premier rang dans cette Physique. Robert identifie la lumière avec cette influence, avec cette bonté qui, selon les Néo-platoniciens, émane de la Cause suprême, pour s’épancher, comme en une suite de cascades, suivant la gradation descendante des créatures inférieures. Assez souvent, les écrits néo-platoniciens et, en particulier, le Fons vitæ d’Avicébron avaient comparé cette effusion de la bonté à la propagation de la lumière, pour que Robert pût être naturellement conduit à conférer à la lumière le rôle essentiel que lui attribue toute sa philosophie. Et d’autre part, l’influence du système d’Alpétragius se reconnaît aisément en cette description du Monde. Grosse-Teste demeurait donc, au sujet des principes de l’Astronomie, dans une indécision que connurent également bon nombre de ses contemporains. Lorsqu’il vou-

  1. Au lieu de cometarum, le texte porte chartarum.