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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


figure sphérique est seule compatible avec une rotation éternelle. Voici comment Maître Robert présente ce raisonnement [1] :

« L’avis qu’on doit tenir devient évident si l’on considère ce que c’est que l’archétype du Monde, existant dans l’intelligence divine avant la création du Monde ; c’est à la ressemblance de cet archétype que le Monde fut créé ; ce monde [idéal] est donc en l’intelligence divine ; or, de l’avis de Saint Augustin, ce qui est en Dieu est identique à Dieu ; de même, donc, que Dieu n’a ni commencement ni fin, ainsi en est-il de ce Monde-là. Or la figure qui n’a ni commencement ni fin est la figuré circulaire. Donc etc. »

C’est le Néo-platonisme chrétien de Saint Augustin qui inspirait ce passage. Parfois, Maître Robert se rattache au Platonisme pris sous sa forme première. Pour justifier l’existence des quatre éléments, il rappelle une doctrine du Timée [2] : « Platon dit qu’entre deux nombres cubiques, on doit insérer deux nombres intermédiaires qui aient même rapport [entre eux et] aux nombres extrêmes ; de même, entre les deux éléments extrêmes, faut-il placer deux éléments intermédiaires qui aient même rapport entre eux et aux éléments extrêmes ». L’auteur explique ce qu’il faut entendre par là, et termine par cette réflexion : « En effet, comme le dit Boèce, dès la première origine du Monde, toutes choses ont été formées en raison du nombre ».

Robert l’Anglais va jusqu’à modifier dans le sens platonicien la théorie des Intelligences motrices des cieux qu’exposait Averroès au De substantiel orbis. En cette théorie, qui est celle même d’Aristote, Dieu, premier moteur est cause du mouvement diurne de la sphère suprême ; les autres sphères participent par entraînement à ce mouvement ; en outre, chacune d’elles doit son mouvement propre à une intelligence particulière ; en chaque sphère, est un moteur conjoint qui meut son orbe afin de s’assimiler à l’intelligence correspondante.

Ce n’est pas exactement ainsi que Maître Robert conçoit le mouvement des sphères ;

« Les sphères célestes, dit-il [3], ont deux mouvements. Le premier, d’Orient en Occident, fait, en une nuit et un jour, une révolution complète, de point en point, autour de la Terre et sur les pôles du monde ; de ce mouvement-là sont mues les neuf sphères, d’un mouvement uniforme et continuel, sous l’action de la pre-

1. Ro. Anglici Op. laud., capat I, glosa III, seoteotia secundæ partis ; ms. cit., fol. g, coll. a et b.

2. Ro. Anglici Op. laud , cap. I, glosa II ; ms. cit., fol. 5, col d.

3. Ro. Anglici Op. laud., cap. I, glosa III. senlentia primæ partis ; ms. cil., fol. 8, col. d, et fol. g, col. a.

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