les planètes. Albert le Grand avait négligé de faire cette remarque
et, par là, son raisonnement prêtait à objection. Son disciple
prend soin de se mettre en garde contre cette objection ; il nous
rappelle que « selon certains astronomes, le [centre du] cercle de
chacune des planètes se meut sur un petit cercle décrit autour de
la Terre ; quelques astronomes, cependant, n’accordent pas qu’il
en soit ainsi pour toutes les planètes ; ils raccordent seulement
pour certaines d’entre elles. » On sait, en effet, que Ptolémée
avait reconnu à la Lune et à Mercure un mouvement propre de
l’apogée, qu’Al Zarkali avait étendu cette observation au Soleil.
La correction apportée par Bernard au raisonnement d’Albert
lui vient donc rendre très heureusement la force démonstrative
qu’on eût été en droit de lui contester.
Jusqu’ici, Bernard a paru, à la suite de son maître, adopter l’hypothèse des excentriques et des épicycles « que presque tous les astronomes admettent ». Son opinion semble plus hésitante lorsqu’il examine, trop sommairement, d’ailleurs, la troisième question[1] : Toutes les sphères célestes sont-elles concentriques ?
« Nous devons répondre, dit-il, qu’il y a, à ce sujet, trois opinions différentes.
» La première est celle des physiciens ; ceux-ci supposent que toutes les sphères sont concentriques ; ils nient les excentriques et les épicycles. À leur avis, de même que la région des éléments se divise en sphères concentriques, de même en est-il de la région éthérée ou céleste.
» Mais voici qui semble contraire à cette opinion : tL’observation géométrique a reconnu qu’une même planète tantôt s’éloigne de la Terre et tantôt s’abaisse vers elle ; cela ne se peut entendre si l’on ne confère pas l’excentricité aux cercles [déférents] et si l’on n’admet pas les épicycles, car une planète a le mouvement circulaire et non pas le mouvement rectiligne.
» La seconde opinion est celle des mathématiciens. Ils admettent que les sept sphères des planètes sont excentriques, tandis que les autres sphères, aussi bien celles qui se trouvent au-dessus des sphères planétaires que celles qui se trouvent au-dessous, sont concentriques à la Terre. De l’avis de tous, en effet, les trois sphères des éléments et les trois sphères célestes les plus élevées sont concentriques ; mais les sphères intermédiaires, celles des astres errants, sont excentriques à la Terre. Tous s’accordent à reconnaître que le cercle des signes, qui est dans la huitième
- ↑ Ms. cit., fol. 70, coll. b et c.