» Plus élevés et plus nobles encore que tous ces orbes, sont le ciel cristallin et la dixième sphère ; ces deux orbes atteignent la bonté parfaite au moyen d’un petit nombre de mouvements, savoir le mouvement oblique et le mouvement diurne ; chacun d’eux a, sur les diverses choses, un effet unique et simultané (reddendo singula simul) ; ils n’ont donc pas besoin de porter d’étoiles ni d’avoir des parties qui diffèrent les unes des autres.
» Enfin, plus élevé, plus noble que tous les autres cieux, est le ciel Empyrée, qui est le lieu des bienheureux ; la bonté parfaite, il la possède sans aucun mouvement, sans aucune diversité.
» Ces raisons, le Philosophe paraît en toucher quelques mots à la fin du second livre Du Ciel et du Monde. »
Aristote, en effet, avait invoqué des raisons de convenance analogues pour expliquer comment les sphères célestes inférieures portent un seul astre et se meuvent de mouvements complexes, tandis que la sphère des étoiles fixes compte une multitude d’astres et se meut d’un mouvement simple. Ces raisons, Michel Scot, Albert le Grand, Bernard de Trille les ont, successivement, assouplies et distendues pour les accommoder aux théories astronomiques, différentes les unes aux autres, qu’ils professaient. N’est-ce pas le propre de ces raisons d’ordre et de convenance, de se prêter ainsi à toutes les doctrines qu’on en veut revêtir ? La science du Moyen Age se laissait volontiers séduire par ces sortes de considérations, sans remarquer que leur extrême souplesse suffirait à les priver de toute force démonstrative. Il est vrai qu’elles semblent compenser par leur poétique beauté la rigueur logique qui leur fait défaut.
Plus positives et mieux nourries des enseignements précis de l’Astronomie sont les réflexions qu’en sa dixième leçon, Bernard développe au sujet du mouvement des étoiles fixes ; des trois problèmes auxquels cette leçon est consacrée, c’est, on s’en souvient, le second.
« À ce sujet, dit-il[1], deux questions seront posées :
» En premier lieu, les étoiles fixes se meuvent-elles ? Il semble que non. Le Philosophe dit, en effet, qu’elles ne se meuvent pas par elles-mêmes : qu’elles demeurent en repos, fixement attachées à finir orbe avec lequel elles se meuvent. En outre, Isidore dit que les étoiles (stellaæ) sont ainsi nommées de stando, car elles demeurent toujours fixes dans le ciel.
» En faveur de l’opinion contraire sont ce que dit Ptolémée et
- ↑ Ms. cit., fol.92, col. d, et fol. 93, coll. a, b, c et d.