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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/240

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CHAPITRE XVIII
LES PETITS MOUVEMENTS DE LA TERRE ET LES
ORIGINES DE LA GÉOLOGIE

I
LA GÉOLOGIE AVANT ARISTOTE

Ces mêmes raisons de Mécanique vont conduire Buridan et ses élèves à constituer une Géologie. Elle sera bien différente, certes, de celle qui s’enseigne aujourd’hui, mais plus différente encore des Géologies qui avaient cours avant le xive siècle. Celles-ci, dans les lentes variations qui, au cours des siècles, ont déplacé les continents et les mers, voyaient un effet du changement périodique auquel l’Univers est soumis, des alternatives que les révolutions célestes lui imposent, pendant la durée d’une Grande Année. Les Géologies anciennes prenaient pour principe le principe même de l’Astrologie, le gouvernement des choses d’ici-bas par les mouvements du Monde supérieur.

La Géologie que professeront les Nominalistes parisiens du xive siècle ne sera plus un chapitre de l’Astrologie ; pour expliquer les modifications éprouvées par la figure des continents et des mers, elle n’invoquera plus l’influence des orbes ni des étoiles qu’ils portent ; le chaud et le froid, l’évaporation des eaux marines et la chute de la pluie, l’action continuelle de la pesanteur sont les seules causes dont ils réclameront le secours ; sans doute, ils ne devineront pas toujours du premier coup le rôle exact que ces causes ont joué ; mais par cela même qu’ils n’appelleront à leur aide aucune force, sauf celles qui, chaque jour, travaillent très manifestement sous nos yeux, leurs tentatives seront animées de l’esprit même qui dirige les recherches des géologues modernes.

Pour apprécier avec justice l’œuvre des géologues du xive siècle, voyons ce que la Géologie avait été avant eux.