présent, la partie la plus élevée, alors nous devrons accorder que la position occupée aujourd’hui, à l’égard des diverses parties du ciel immobile, par l’Océan a été la position de la terre ferme, qu’elle le redeviendra, et inversement.
» Il reste donc à chercher si la position des principales montagnes sur la terre peut ainsi changer, s’il peut y avoir permutation entre la partie la plus élevée et la plus grande dépression. »
Voici donc Jean Buridan conduit à discuter le problème de la génération et de la destruction des montagnes ; c’est l’objet de la vingt-et-unième et dernière question sur le premier livre des Météores[1] : « De très grandes montagnes, aussi grandes. que celles que nous voyons, peuvent-elles être détruites et, là où elles se trouvaient, la terre peut-elle redevenir plaine ? »
« Albert, nous dit le physicien picard, indique trois modes de formation des montagnes ; le premier, c’est le flux de la mer et le mouvement impétueux des autres eaux… ; le second, c’est le vent qui meut et rassemble la poussière et le sable… ; le troisième, que je tiens pour plus réel que les deux autres, c’est le tremblement de terre qui, parfois, soulève une grande masse de terre. » Mais le tremblement de terre lui-même ne paraît pas, à notre auteur, capable de produire des montagnes fort élevées.
« Je ne crois donc pas que des montagnes aussi considérables puissent être produites d’une manière naturelle, sinon par un grand mouvement d’ensemble de la terre tout entière. Au premier abord, il semble qu’un tel mouvement soit impossible, car Aristote dit, au second livre Du Ciel, que la terre demeure naturellement en repos au milieu du Monde ; les corps pesants, en effet, aussi bien que les corps légers doivent reposer naturellement en leurs lieux propres et ne se peuvent mouvoir hors de ces lieux, si ce n’est par violence ; or on ne saurait assigner quelle force est capable de violenter la terre, qui est si grande.
» Pour déterminer donc tous les préliminaires douteux, je veux, à ce sujet, poser des conclusions qui découlent les unes des autres. »
De ces conclusions, nous avons, au chapitre précédent, cité les quatre premières ; elles disent comment, au gré de Buridan, la terre et les mers sont, par leur seule pesanteur, tenues en
- ↑ Johannis Buridam Op. laud. ; consequenter queritur 21o et ultimo circa primum metheororum, utrum possibile est tantos montes quanti maximi apparent nobis destrui et reverti ibi terra ad planiciem. Ms. cit., fol. 202, col. c, à fol. 204, col. a.