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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

se corrompre un jour ; et ce lui est occasion de donner, de sa Géologie, un résumé succinct, mais précis. Maître Jean Buridan tenait donc fort à ce que ses élèves connussent son opinion touchant le mouvement très lent qui, sans cesse, déplace la terre, et la doctrine géologique qui en découle. Nous allons voir qu’en effet, ces suppositions attirèrent vivement l’attention des physiciens de Paris.


XIV
LA GÉOLOGIE DE BURIDAN ET L’UNIVERSITÉ DE PARIS.
I. UN ADVERSAIRE : NICOLE ORESME


La Géologie de Buridan ne conquit pas du premier coup tous les suffrages.

Nicole Oresme semble tenir, à l’égard de cette doctrine, une attitude hésitante ; tantôt il paraît disposé à l’admettre ; tantôt il lui objecte certaines difficultés.

Voici d’abord un passage où se trouve admis le principe même de la théorie de Buridan[1].

« Quant au secunt point, ie suppose que les élémens naturèlement pevent, selon leurs parties, croistre et appeticer par généracion ou corruption ; et ce suppose Aristote, ou chapitre précédent, et appert ou livre de génération et corruption et en pluseurs autres lieux. Et doncques, posé que par telle génération feust faicte addicion notable en aucune partie de terre, si comme, pour exemple, en la partie où nous sommes sous le méridian ou ligne de mydi, et soit ceste partie de terre signée par B, ou que par corrupcion feust faicte diminucion en la partie opposite ; je di que, cest fait, il appert par Aristote, ou chapitre précédent, que le lieu où nous sommes, appelé B, descendroit vers le centre du Munde, appelé A. »

Oresme, pour justifier sa conclusion, nous renvoie au chapitre précédent ; or, en celui-ci, nous lirons une raison qui peut, au moins dans certaines circonstances, faire douter de cette conclusion.

Voici d’abord la traduction que l’Évêque de Lisieux donne du texte d’Aristote[2] :

1. Nicole Oresme, Le livre d*Aristote appellé du Ciel et du Monde, livre II, ou XXXI0 chapitre, il preuve encore que la terre est spérique par quatre raisons de Astrologie. (Bibliothèque Nationale, fonds français, ms. n° 1.083, fol. 94, col. d.)

2. Nicole Oresme Op, laud., livre II ; ou XXXe chapitre, il monstre que la terre est de figure spérique par II raisons naturèles ; ms cit., fol. 93, col. c.

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