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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/362

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LA ROTATION DE LA TERRE

théories astronomiques, il donnait, à la fois, plus de simplicité et de précision. Mais s’il obtenait de tels résultats, c’est qu’il ne se contentait pas d’attribuer à la terre une rotation diurne autour de son axe ; il lui conférait aussi une circulation annuelle autour du Soleil. Or, de cette dernière hypothèse, aucun de nos physiciens de Paris ne paraît avoir eu le moindre soupçon ; on ne saurait s’en étonner ; l’Arénaire d’Archimède était alors inconnu. Partant, mis en présence de la seule supposition de la rotation terrestre, qui sauvait le mouvement diurne aussi bien que la rotation du premier mobile, mais n’était capable de sauver aucun autre phénomène céleste, ne furent-ils point gens sensés en se refusant à bouleverser sans profit la Mécanique et la Physique qu’ils avaient accoutumé de tenir pour vraies ? Cette raison avait empêché François de Mayronnes de donner dans l’hypothèse du mouvement de la terre ; elle retint, à leur tour, Jean Buridan, Albert de Saxe et Pierre d’Ailly, et Nicolas Oresme lui-même l’avait, tout d’abord, tenue pour valable. Le parti qu’elle conseillait nous paraît routinier, à nous qui, pour le juger, nous éclairons aux lumières de la science développée par les siècles suivants ; au XIVe siècle, il était le plus sensé ; ceux qui l’abandonnaient se livraient à l’admirable imprudence des intuitions divinatrices.


VI
LE MOUVEMENT DE LA TERRE ET LA PRÉCESSION DES ÉQUINOXES.
ALBERT DE SAXE


Aristarque de Samos n’attribuait à la terre que deux mouvements. Copernic lui en devait donner trois ; à la rotation diurne du globe terrestre autour de son axe, à la circulation annuelle autour du Soleil, il devait adjoindre un autre mouvement ; une très lente rotation de l’axe du mouvement diurne autour d’un axe perpendiculaire au plan de l’écliptique était appelée à sauver le mouvement de précession des équinoxes, qu’Aristarque ne soupçonnait pas ; de toute la doctrine copernicaine, cette partie est précisément celle qui devait exciter au plus haut point l’admiration des contemporains et des successeurs immédiats de l’astronome de Thorn.

Or cette pensée que la précession des équinoxes n’est peut-être pas l’effet d’un mouvement propre des étoiles, mais bien la