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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/76

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LA THÉORIE DES MARÉES

l’enseignement de Gilles, que nous allons retrouver sous la plume de Témon.

« Voici, nous dit celui-ci[1], ce que je regarde comme le plus probable :

» Selon ce qui a été touché, dans la question précédente, tandis que le Soleil se meut sans cesse entre les deux tropiques, il frappe la mer qui se trouve au-dessous de lui de rayons perpendiculaires qui produisent beaucoup de chaleur ; l’eau qui se trouve directement au-dessous du Soleil entre en ébullition, comme dans une marmite qu’on approche du feu. Cette eau en ébullition occupe un plus grand volume, en sorte que certaines autres parties d’eau lui cèdent place. Cette ébullition s’avance sans cesse de l’Orient vers l’Occident ; ainsi, du lever du jour jusqu’à midi, apparaît un flux.

» Mais par l’effet de cette ébullition, une grande quantité d’eau subtile se trouve évaporée ; près du Nord, la Lune refroidit ces vapeurs ; d’ailleurs, comme la Lune possède une vertu capable de créer de l’eau [aux dépens de l’air], elle augmente, dans la région septentrionale, la masse de la mer, d’autant qu’en ce lieu, le Soleil est sans force pour élever des vapeurs.

» Ainsi, au voisinage de midi (circa mendier), la mer est pleine, d’un côté, par l’effet de la raréfaction de l’eau, et d’un autre côté, par l’effet de la génération [de nouvelles masses d’eau]… »

Comme Gilles de Rome, Témon admet que, des deux flux qui se produisent chaque jour, l’un est dû à l’action du Soleil et l’autre à l’action de la Lune. C’est une opinion fausse et insoutenable ; mais elle contient en germe une grande vérité que développeront les physiciens italiens au temps de la Renaissance ; cette vérité est la suivante : Le phénomène des marées, tel que nous l’observons, est la résultante de deux phénomènes plus simples, une marée lunaire et une marée solaire.


VIII

L’ÉCOLE DE PARIS AU XIVe SIÈCLE (suite), — LES QUESTIONS
SUR LES MÉTÉORES FAUSSEMENT ATTRIBUÉES À DUNS SCOT


La grande édition des œuvres de Duns Scot, donnée à Lyon, en 1639, contient des Questions fort étendues sur les quatre

1. Temonis Jupæï Op. laud., lib. II, quæst. IL

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