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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome V.djvu/272

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LA CRUE DE L’ARISTOTÉLISME

siècles de ses bontés et de ses grâces. » C’est au Livre des Causes que se rapporte cette allusion, à ce Livre des Causes dont Gérard de Crémone avait donné une traduction ainsi intitulée[1] : Liber Aristotelis de expositione bonitatis puræ.

Ces sequaces d’Aristote sont bien, dans la pensée de l’Évêque de Paris, les Néo-platoniciens arabes ; l’erreur qu’il va réfuter au chapitre que nous venons de citer, il déclare qu’il l’extrait[2] « du discours d’Aristote, et des discours d’Al Fârâbi, d’Avicenne et des autres qui se sont accordés sur ce point avec Aristote. »


B. Critique de la théorie des Intelligences célestes.


Au De Universo, toute la première partie ou subdivision de la seconde partie principale est ainsi consacrée[3] à l’examen de la théorie « d’Aristote et de ceux qui le suivent » sur les Intelligences séparées. Nous y lisons des passages tels que celui-ci[4] :

« Les causes qui ont conduit Aristote à supposer l’existence de neuf Intelligences sont les neuf mouvements des neuf cieux mobiles. » Ce seul nombre neuf, attribué aux Intelligences et aux cieux, marque assez que ce sont les auteurs arabes, et non pas Aristote, qui ont renseigné Guillaume. Aussi est-ce l’écho des enseignements d’Avicenne et d’Al Gazâli que nous allons entendre :

« Aristote, en effet, a conféré aux cieux des Âmes qui les meuvent ; à ces âmes, il a donné des objets d’amour intelligibles séparés de la matière ; ce sont des Substances intelligentes et très parfaites ; les Âmes, en contemplent continuellement la perfection qu’elles recherchent avec un très violent amour, éprouvent un désir très ardent de devenir semblables en perfection à ces Intelligences et, en même temps, de leur assimiler les cieux.

» Or, cette perfection des Intelligences consiste, dit-il, en une actualité complète par laquelle il n’est rien en elles qui demeure en puissance ; tout ce qui a trait à leur perfection, dans la mesure où cela leur est possible, elles le possèdent perpétuellement en acte…

  1. B. Boncompagni, Della vita e delle opere di Gherardo Cremonese, Roma, 1851, p. 5.
  2. Guillermus Parisiensis Episcopus, loc. cit., éd. 1516, pars I, cap. LIV ; t. II, fol. CCXVIII, col. c ; éd. 1674, pars II, cap. IX, p. 804, col. a.
  3. Guillermi Parisiensis Episcopi, De Universo Secunda pars principalis, éd. 1516, proœmium ; t. II, fol, CXCVI, col. b ; éd. 1674, Secuudæ partis pars I, cap. I, fol. 761, col. b.
  4. Guillermi Parisiensis Episcopi, Op. laud., Secunda pars principalis, pars I, cap.III ; éd 1516, t. II, fol. CXCVI, col. d, et fol. CXCVII, coll. a et b. ; éd. 1674 fol. 762, col. b, et fol. 763, coll. a et b.