hypostase divine, et par là, le corps vivant et le cadavre sont numériquement le même corps ; mais du point de vue simplement naturel, le corps du Christ vivant et le cadavre du Christ ne sont pas numériquement le même corps ; ils ne sont pas purement et simplement le même corps, simpliciter, mais seulement sous un certain rapport, secundum quid.
Quant à l’humanité, elle consiste essentiellement dans l’union de l’âme et du corps. Aussi, durant les trois jours de sa mort, « Jésus-Christ ne fut ni le même homme ni un autre homme ; il ne fut pas homme du tout. »
Assurément, un disciple d’Avicenne ou d’Avicébron échapperait à toutes ces épineuses conséquences. Dans un homme vivant, dirait-il, il y a deux formes substantielles coexistantes et superposées l’une à l’autre ; d’abord, la corporéité qui confère à la matière de cet homme des dimensions déterminées et individualise le corps ; puis l’âme. Lorsqu’à la mort, l’âme se sépare du corps, la corporéité demeure, gardant, à la même matière, les mêmes dimensions déterminées, en sorte que le cadavre est vraiment le même corps individuel que le corps vivant.
Thomas d’Aquin ne saurait admettre semblable opinion ; « En aucun corps, disait-il[1], il n’y a plus d’une forme substantielle… Peut-être dira-t-on que la corporéité est la forme du corps. Ce mot corporéité se prend en deux sens différents ; tantôt, il signifie les trois dimensions, ce qui n’est pas une forme substantielle, mais un accident ; tantôt, il signifie la forme dont proviennent les trois dimensions ; cette forme-là n’est pas differente de la forme spécifique. »
Nous venons d’entendre Saint Thomas invoquer l’axiome sur lequel repose toute cette théorie. Dans un individu déterminé, il n’y a pas deux formes substantielles ; il y a une forme susbtantielle unique qui est directement conjointe à la matière. De cet axiome, écoutons l’exposé[2].
« Touchant l’ordre des formes, il existe deux opinions.
» La première est celle d’Avicébron et de quelques personnes qui suivent son sentiment. Ils prétendent qu’il existe [en une meme substance] plusieurs formes substantielles différentes qui s’ajoutent les unes aux autres selon l’ordre des genres et des espèces. Ainsi une même chose est substance, puis est corps, puis