engendrée que d’une manière indirecte, par accident, par l’intermédiaire du composé dont elle est l’acte. La génération du composé, d’ailleurs, à partir de la matière, ne soulève plus les objections auxquelles se heurtait la génération directe de la forme à partir de cette même matière ; il est plus vrai qu’en l’essence du composé, il n’y ait rien de l’essence de la matière ; l’essence de la matière fait partie de l’essence du composé substantiel.
« Un agent, donc, n’engendre pas une forme en l’introduisant de l’extérieur en la matière ; il ne l’engendre pas non plus directement (per se) en la matière ; il ne l’engendre pas davantage à partir d’une réalité qui serait quelque chose de la forme, dont l’essence passerait à l’essence de la forme ». En montrant l’erreur que recouvrent ces diverses manières de concevoir la génération do la forme, on ôte tout prétexte à la théorie des raisons séminales.
Venons maintenant à la question qui, au temps d’Henri de Gand, mettait si ardemment les théologiens aux prises. Bans une substance unique et, en particulier, dans l’homme, y a-t-il une seule forme substantielle ou bien plusieurs formes de cette nature v coexistent-elles ?
Cette question, Henri la rencontre dès sa première discussion quodlibétique, tenue en l’année 1276, au voisinage de la fête de Noël ; elle se présente à lui sous la forme[1] qu’elle revêtait volontiers à ce moment : Le corps du Christ, déposé dans le sépulcre et séparé de l’âme, continuait-il a être informé par quelque autre forme substantielle ?
Henri de Gand pense[2] qu’il est « tout à fait contraire à la foi » de dire qu’une forme substantielle nouvelle, étrangère à ce qui était, durant la vie, le corps de Jésus-Christ, est venue informer ce corps après le départ de l’âme. « Ou bien, donc, il nous faut admettre que l’âme ne perfectionne pas immédiatement la matière ; il nous faut supposer que ce perfectionnement immédiat provient d’une certaine forme substantielle, soit d’une corporéité, soit d’une forme de mixtion, intermédiaire entre l’âme et la matière ; cette forme demeurerait en la matière après que l’âme
1. Henhici à Gandavo OaodlibHn qtindlîb. 1, quæst. IV ; l’trum corpus Christ ! in sepulcbro liabuit aliquam i’orniatn subtantialeni qua iut’oriuabatur, anima ejus ab ipso scparala.
2. Henri de Gand, toc. cil.’, éd. cit. fol. Il, verso et fol. 111 recto.