par le Livre des Causes et par Thierry de Freiberg. Damascius reprochait à Proclus de n’avoir pas expliqué la ὕφεσις par laquelle l’Etre sort de lui-même, s’atténue et se subdivise ; Maître Eckehart déclare que cette ὕφεσις que cet abaissement n’existe pas.
Eckehart était né à Hochheim, près de Gotha ; il pritl’habit de Saint Dominique à Erfurt, appartint au Couvent de Cologne et fut, en 1298, nommé prieur de Thuringe : il vint à Paris lire les Sentences, puis, pourvu du grade de Maître en Théologie, il fut successivement provincial de Saxe en 1303, vicaire général de Bohême en 1307, et derechef provincial de Saxe ; en 1311, il enseigne à Paris ; puis on le trouve prêchant à Strasbourg, enseignant à Cologne au Studium generale des Dominicains ; il mourut en 1327.
Eckehart a laissé un grand nombre de sermons et de traités mystiques en allemand ; c’est à ces écrits qu’il doit surtout sa réputation ; il a, en outre, composé en latin un traité philosophieo-théologique, intitulé Opus tripartitum, et des commentaires sur divers livres de l’Ancien testaments Les écrits latins de Eckehart ont été savamment étudiés par le P. H. Denifle[1], qui en a publié des fragments étendus. C est à ces traités latins qu’il convient surtout de demander quelle fut la doctrine d’Eckehart ; c’est à eux que nous nous adresserons.
Ils nous apprendront, tout d’abord[2], quelles influences dirigent la pensée de Maître Eckehart ; les auteurs, maintes fois cités, dont cette pensée se réclame, ce sont Proclus et le Livre des Causes.
Dans sa XIIe proposition, Proclus dit[3] : « Le principe et la cause première de tous les êtres, c’est le Bien ».
« L’existence (ens), l’unité, la vérité, la bonté, sont ce qu’il y a de premier dans les choses et de commun à toutes les choses ; ils résident en toute chose avant la venue de quelque essence (esse) que ce soit ; ce sont propriétés universelles de toutes les choses. Et s’ils y résident, c’est par la seule action de la Cause première et universelle de toutes choses. Cela n’empêche pas les choses, toutefois, d’être choses singulières en vertu des influences qui sont propres à chacune d’elles. Au feu, la forme du feu ne donne
1. P, Heinrich Denifle, O. P. Meister Ec/ceharts lateinische Schri/len, tind die Grundanschaaïutg seiner Lehre (Archio Jür Litleraiur and Kirchtngeschichte des.Mtlleiaiturs, herai>s$resreben vo» Heinrich Df.nifi.e itnd Bbanz Ehkle, Bd. ii, 1886, pp. 517-615).
2. Magislri Eckahdi Opus trïpartitum ; Operis peopositionum proæmium (H. Dknikle, Op. Ititid, pp 5/j3-5/|5).
3. ΠΡΟΚΛΟΥ ΔΙΑΔΟΧΟΥ ΠΛΑΤΟΝΙΚΟΥ Στοιχείωσις θεολογική, éd. Creuzer, prop. XII ; éd. Francofurti ad Mœnum, 1882, pp. 20-21 : éd. Parisiis, 1800, p. LV.