corps céleste est nécessairement un être animé. Il est donc évident par là qu’en outre du premier Moteur, qui meut à titre de fin, Averroès admet un autre moteur, conjoint au corps du ciel ; ce moteur, il le nomme l’âme qui meut d’une manière exécutive…
» Le Philosophe ne dit nullement[1] que le premier Principe meuve à la façon d’un être qui aime et qui désire, mais seulement qu’il meut à titre d’objet aimé et désiré. La raison qu’il en donne est la suivante : Rien ne peut mouvoir tout en demeurant absolument immobile, à moins de mouvoir à titre de fin et d’objet aimé. C’est la tin, en effet, qui met en mouvement le moteur actif et exécutif. Or, en chaque genre de mouvement, le premier principe ne peut aucunement se mouvoir ; sinon, il ne serait pas le premier. 11 ne meut donc qu’en jouant le rôle de fin. Dès lors, si l’on attribuait au premier Principe lui-même la production exécutive du mouvement, on rendrait nul tout ce raisonnement par lequel le Philosophe démontre qu’il meut seulement à titre d’objet aimé et de moteur immobile.
» Dira-t-on que ce moteur meut, en s’aimant lui-même, en sorte qu’il est mû par sa propre bonté ? Cela ne se peut soutenir. qui aime et qui désire, il a dit seulement qu’il mouvait à titre d’objet aimé et désire. En effet, il est impossible que le premier Principe soit mû par sa propre bonté. Il n’est mû d’aucune manière, ni en réalité, ni selon la raison, ni par quelque autre [fin]. Le rôle d’être qui est mis en mouvement par une fin est un rôle qui implique, [en l’être qui est ainsi mis en mouvement], quelque imperfection. En Dieu, donc, il n’y a rien qui joue le rôle d’un être mil vers une fin ou subordonné à une fin. Dieu est, lui-même, fin toute pure, en sorte qu’il n’y a rien en lui qui joue un autre rôle que celui de fin. Partant, il est impossible qu’il soit à lui-même sa propre fin, ou qu’il se meuve lui-même à la façon dont une cause finale meut la cause efficiente, le moteur qui exécute le mouvement.
» Les susdits Philosophes ont donc posé cette conclusion : Les moteurs des orbes désirent quelque chose qui est plus noble et plus excellent qu’eux-mèmes ; ce quelque chose, c’est le premier principe qui est Dieu. «
Si l’on veut bien oublier l’erreur que nous avons signalée, cette analyse faite par Auriol apparaît comme l’exposé le plus complet, le plus pénétrant, le plus exact, le plus clair que le
1. Pierre Auriol, loc. cit., p. gG i, col. 2, et p. 962, col. t.
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