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L’HORREUR DU VIDE

prêté par l’intermédiaire de quelque commentaire ; à l’aide des clepsydres, on démontrait, selon Aristote, que l’air était un corps, non que le vide n’existait pas.

« Il faut d’abord remarquer, ajoute-t-il, que le mot clepsydre a comme deux significations.

» Dans un sens, on appelle clepsydre un petit trou qu’on perce, dans un tonneau, à côté du grand trou (la bonde) par lequel on verse le vin ; on le perce afin que les vapeurs qui s’élèvent de l’humidité du vin, par l’effet de la chaleur naturelle, tandis que la fermentation s’accomplit, puissent sortir et ne brisent pas le tonneau… On appelle aussi clepsydre, ce qui sert à boucher ce trou.

» En un autre sens, la clepsydre est un vase qui, dans sa partie supérieure, a un trou ou orifice unique et qui, dans sa partie inférieure, a sept trous plus petits que l’orifice supérieur. C’est de la clepsydre prise avec cette signification, que nous entendons à présent parler. »

Il est clair que Bacon, lorsqu’il écrivait ces lignes, ignorait le sens précis du mot clepsydre ; mais il avait sans doute remarqué qu’au commentaire d’Averroès, ce mot est traduit par le mot chantepleure ; aussi s’empresse-t-il de lui assigner toutes les significations que chantepleure prend en français, y compris celles qui ne sauraient aucunement convenir à clepsydre. Ce lui sera, d’ailleurs, une occasion de consacrer une bonne partie de la question de la clepsydre à exposer ses idées sur la fermentation du vin.

D’ailleurs, au temps où Bacon discutait ses Questions, les clercs prenaient le mot : clepsydre dans une foule de sens différents. Nous le pouvons connaître par le témoignage d’Alexandre Neckham, qui écrivait vers 1220.

Sous ce titre : De ustensilibus, ce fécond auteur nous a laissé une sorte de dictionnaire[1] des termes usuels ; les mots dont l’explication est donnée ne sont pas rangés suivant l’ordre alphabétique, mais dans un certain ordre méthodique ; ici sont réunis les noms de tous les meubles qu’on trouve dans une chambre à coucher, là de tous les métaux et de tous les gemmes que renferme la boutique d’un orfèvre.

1. Bibliothèque nationale, fonds latin, ms. n° 15171. Fol. 176, col. a, inc. : Sicut dicit Tullius in principio sive in prologo suerectorice… Foi. 199 (marquée 299), col. a, des. : Desinentia in us secunde declinationis indifïerentermas culi generis fta ut saphîrus.

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