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LE MOUVEMENT DES PROJECTILES

de la mesure qui leur convient reviennent à leur juste densité ; celles qui ont été condensées reviennent à leurs dilatations normales. »

Ainsi s’expliquera la continuation du mouvement des projectiles lancés au sein de l’air :

« Un corps qui a été condensé ne se peut dilater sans communiquer une impulsion aux corps voisin. Lors donc que le moteur balistique cesse d’agir, la partie de l’air qui a été condensée par l’impulsion se dilate ; en se dilatant, elle pousse à la fois le projectile et la partie de l’air qui lui est voisine ; celle-ci, à son tour, pousse simultanément le projectile et une nouvelle partie de l’air. Il en est ainsi jusqu’au moment où l’impulsion devient si faible que le mouvement du projectile prend nécessairement fin. »

À l’exemple d’Averroès, Gilles compare ce mouvement de dilatations et de condensations alternatives qui se propage dans l’air aux ondes circulaires qu’engendre la chute d’une pierre dans une eau tranquille.

Ce mouvement n’est pas, d’ailleurs, le seul qui agite l’air au voisinage du projectile. Le projectile fend l’air ; cet air, écarté, se referme avec violence à l’arrière du projectile ; en se refermant ainsi, il exerce sur le projectile une pression qui contribue à la continuation du mouvement. C’est là l’ἀντιπερίστασις. L’antipéristasis n’est pas capable de rendre compte, à elle seule, de la prolongation du mouvement des projectiles, mais elle y joue un rôle.

Henri de Gand avait rédigé une Exposition de la Physique d’Aristote. De cette exposition, nous ne possédons plus qu’un fragment ; le texte conservé[1] commence au milieu d’une discussion relative au cinquième livre ; il se poursuit jusqu’à la fin de l’ouvrage.

Cette exposition se propose seulement d’éclaircir la pensée d’Aristote, et nullement de la discuter. Aussi, le commentaire qu’annonce ce texte[2] : De hiis autem que feruntur explique-t-il ce qu’Aristote a dit du mouvement des projectiles sans formuler aucune objection, sans faire aucune allusion à l’hypothèse de l’impetus.

1. Bibliothèque Nationale, fonds latin, ms. no 16609. Fol. 62, dans la marge supérieure, d’une écriture plus récente : Henrici de Gandavo Super 40r ultimos libros phisicorum literalis expositio valde bona. Fol. 62, col. a, inc. : Passio in patiente. Fol. 108, col. b, des :… est intentum et patet. Explicit. a magistro Henrico de gandavo édita anno domini mo cco septuagesimo viiio.

2. Ms. cit., fol. 107, col. c et d.

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