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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/153

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

tre eux, il reprend, au sujet des Universaux, la thèse péripatéticienne. « Le prince et l’archidocteur de la vérité, dit-il ç’a été Aristote ; ce ne sont que des Épicuriens, attachés à la lettre et superficiels, ces gens qui suivent l’hérésie, condamnée à Paris, d’Ockam et de ses collègues, Buridan et Marsile ; au lieu de suivre Aristote et les autres Anciens, Ockam, cet Anglais, s’érigea en rival jaloux des traditions léguées par nos pères... Oui, les universaux existent, et ils n’existent pas simplement dans l’esprit ; ils n’existent pas, non plus, hors de l’esprit, séparés des individus, comme nous l’avons précédemment prouvé ; c’est donc dans les individus qu’ils existent. »

« Ces points clairement examinés, disait encore notre auteur[1], et discutés avec évidence selon la doctrine d’Aristote, il sera bien facile de voir combien est fructueuse et fidèle cette opinion des Anciens sur laquelle le blâme est jeté par l’invention nouvelle et contraire des Modernes. Alors nous examinerons les problèmes au sujet desquels les compétences des Anciens sont divisées l’une contre l’autre. » Notre auteur énumère vingt et une questions de Logique, de Physique, de Métaphysique qui sont, pour Saint Thomas d’Aquin, autant d’occasions de contredire Albert le Grand ; l’examen des deux opinions opposées l’amène invariablement à préférer l’avis du maître à celui du disciple.

Cette discussion en faveur d’Albert ne pouvait être du goût dés Thomistes de Cologne.

Le donjon de la doctrine thomiste, c’était la Pension de Heerenberg, Bursa Montis Domini, sise place des Seize-maisons, à Cologne. C’est là qu’enseignait Gerhard Terstegen ou Teerstege (Gerardus de Monte), qui mourut en 1480.

La vénération de Gerhard pour Thomas d’Aquin l’avait conduit à composer un commentaire du traité De ente et essentia[2]. Dès la première ligne de ce commentaire, le saint docteur est appelé « insignis peripateticæ veritatis interpres ». Cet éloge sonne assez étrangement à l’ouverture d’un opuscule qui marque, entre l’essence et l’existence, une distinction formellement condamnée par Aristote. Gomme tant d’autres thomistes,

1. C. Prantl. Op. laud.t note 52, p. 183.

2. C. PraNtl, Op. laud., Bd. IV, note 49, pp. 182-133.

3. Tractatus Sancti Thome de ente et essentia seu quidditatibus rerum intitulâtes, — Colophon : Commentatio venerabilis viri artium magistri necnon sacre théologie professoris eximii magistri Gerhardi de Monte compilata circa compendium de quidditatibus rerum quod edidit sançtus Tho. de Aquino insignis peripathetice veritatis interpres. hic feliciter terminatur cum textu. — Sur les deux éditions d’œuvres de Joannes Versoris auxquelles ce commentaire se trouve joint, voir plus haut, note p. 114.

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