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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/195

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

ment délaissées ; il n’en faudrait pas conclure qu’il se soit soustrait, en toute occasion, à l’influence du Venerabitis Inceptor, que cette influence gardât, sur lui, fort grand empire, nous en trouvons la preuve dans ce qu’il dit des universaux.

Notre auteur commence par déclarer[1] qu’il y a deux sortes d’universaux, l’universel logique et l’universel métaphysique ; celui-ci ressortit au métaphysicien ; il n’en parlera pas ; il traitera seulement de celui-là, de celui que considère l’Introduction aux catégories de Porphyre, cette première partie tle l’Ars vetus ; et c’est pourquoi Sunczell déclare que sa discussion sera discussion de Veterista.

Ce qu’il va nous dire est, prétend-il, conforme à la pensée d’Aristote, ad mentem Aristotelis ; or, de cette doctrine qui nous est donnée comme purement péripatéticienne, voici quelques affirmations essentielles :

« L’universel dont il est ici question, ce n’est rien d’autre qu’un concept plus commun, plus général, plus universel qu’on s’est formé d’une chose, ou bien encore c’est une connaissance commune et confuse que nous avons acquise de quelque, chose. Un homme, par exemple, voit quelque chose remuer ; l’éloignement l’empêche de savoir si c’est un âne, un homme ou un cheval ; alors, en cet homme, se forme, tout d’abord, un concept commun ou une connaissance confuse ; il connaît que c’est un certain être, une substance, un corps, un être animé. Le singulier, au contraire, c’est un concept ou une connaissance qui n’est pas ainsi commun, universelle, mais qui précise davantage ; le singulier, ce n’est donc rien d’autre qu’une connaissance qui n’est pas confuse ainsi que l’universel, mais qui est plus précise (certa), plus spéciale ; c’est ce qui a lieu lorsque nous concevons cette chose [que nous avons vu remuer au loin] sous le concept d’homme ou sous le concept de cheval, puis sous le concept de Socrate ou sous celui de Bruneau ; en effet, cette chose que nous avons vue au loin, nous l’avons connue d’abord d’une façon confuse, puis d’une manière distincte, enfin plus distinctement encore…

» Sachez que les connaissances présentent entre elles un grand nombre de degrés qui sont plus ou moins élevés selon que l’une notifie plus qu’une autre son objet. En effet, la connaissance la plus confuse ne rassasie pas le désir de connaître

  1. Friderici Sunczell Op. laud., lib. I, quæst. VII ; éd. cit., fol. sign. d, ro et vo.