Aller au contenu

Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/221

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
218
LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

» Cinquième expérience : Les jeunes garçons lancent la toupie de telle façon qu’elle tourne, qu’elle se meut d’un mouvement de rotation où elle paraît immobile ; ce n’est pas l’air qui fait cela car, ainsi que la toupie, il est comme immobile.

» Sixième expérience : On ne pourrait dire pour quelle raison la meule abandonnée à elle-même se meut plus longtemps que la pierre jetée en l’air, puisque tout autour de celle-ci se trouve de l’air capable de la pousser.

» Septième expérience : On ne pourrait rendre raison du rebondissement d’un soliveau qui tombe de haut ; en effet, l’air qui, selon la première opinion, l’a poussé vers le bas ne saurait le faire rejaillir.

» Huitième expérience : Un homme qui court très vite ne se peut arrêter instantanément ; ce n’est pas à cause de l’air, mais à cause de l’impetus, comme tout le monde l’accorde.

» Or le raisonnement qui est fondé sur des expériences est le meilleur de tous dans les sciences qui comportent démonstration et preuve. Que dis-je ! Il l’emporte, dans ces sciences, même sur l’autorité. — Ratio ergo quæ super experientiis est fundata est optima in Scientiis demonstrativis et probativis ; imo in eisdem vincit ipsam antoritatem. »

» Conclusion : Au début, le projectile est mis en mouvement par l’instrument de projection ; mais ce qui continue à le mouvoir, ce n’est pas l’air qui le suit ; c’est l’impetus imprimé par cet instrument de projection. »

Sunczel définit avec beaucoup de soin ce qu’il entend par cet impetus.

« L’impetus, dit-il, c’est une qualité motrice imprimée au mobile par un moteur extrinsèque ; elle donne, au mobile, de la vitesse vers un certain lieu (velocitat mobile ad certum locum).

» On dit, en premier lieu ; c’est une qualité. En effet, l’impetus est une qualité accidentelle de première ou de troisième espèce, car elle dispose le mobile à tel mouvement ou à tel autre.

» On la dit motrice ; sans doute, Aristote, au premier livre Du Ciel, n’a posé que deux qualités motrices, la pesanteur et la légèreté ; mais en réalité, il y en a trois, la pesanteur, la légèreté et l’impetus. On les appelle motrices parce qu’elles meuvent un mobile d’un lieu à un autre. À proprement parler, l’impetus n’est ni pesanteur ni légèreté, car la pesanteur meut seulement vers le bas et la légèreté seulement vers le haut, tandis que limpetus peut mouvoir le mobile dans tous les sens ; toutefois, l’impetus a comme un goût de pesanteur (sapit