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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/235

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

rellement pour remplir un espace vide ; il descendrait tout aussi naturellement si l’espace vide se trouvait au-dessous de lui.

» Or le Ciel se meut, ce n’est pas qu’il soit dans l’indigence de lui-même ; il se meut en vue de la génération et de la destruction des choses d’ici-bas ; il se meut donc pour la conservation de l’ordre de l’Univers qui, maintenant, consiste dans la génération et la destruction des choses sublunaires. Si donc, cet ordre demeurant ce qu’il est, le Ciel venait à s’arrêter, il s’arrêterait par violence ; mais au renouvellement du Monde, cet ordre sera changé ; comme la forme dont il s’agit incline toujours à la conservation de l’Univers, c’est naturellement alors que le Ciel demeurerait en repos et violemment qu’il se mettrait en mouvement. Le corps pesant nous en fournit un exemple ; il incline, » en effet, à remplir tout espace vide, de quelque côté que se trouve cet espace, au-dessus de lui ou bien au-dessous de lui ; si cet espace se trouve au-dessus de lui, c’est naturellement qu’il monte et violemment qu’il demeurerait en repos dans son lieu naturel ; et le contraire aurait lieu si l’espace vide n’était pas au-dessus de lui, mais à côté ou au-dessous.

» On voit par là que le Ciel se meut plutôt suivant la commune nature que suivant une nature propre. S’il se meut, ce n’est pas qu’il éprouve une disette de lui-même, ou qu’il veuille acquérir quelque perfection par le mouvement, ou qu’il ait en vue sa propre conservation ; le Ciel serait tout aussi parfait s’il demeurait en repos. C’est pour de telles raisons que les corps d’ici-bas se meuvent vers leurs lieux naturels ou fuient naturellement ce qui leur est contraire. Le Ciel, lui, se meut en vue de la conservation des autres êtres suivant l’ordre établi par Dieu dans l’Univers ; nous l’avons dit ; et ce mouvement se fait selon la nature commune ; faire effort pour conserver l’ordre de l’Univers, c’est, en effet, tendance commune à toutes choses. »

Assurément, ces considérations sont ingénieuses ; leur appel à la mystérieuse et complaisante nature universelle nous éloigne singulièrement, semble-t-il, de la théorie de Buridan, qui prétendait plier les mouvements des Cieux aux lois des mouvements que nous observons ici-bas ; en réalité, elles n’eu sont pas si fort différentes qu’il nous paraît ; pour expliquer la révolution de orbes, elles invoquent des principes semblables à ceux qu’on avait accoutumé d’invoquer pour rendre compte de l’ascension de l’eau dans un siphon, de la suspension d’un liquide dans une clepsydre ; avec la théorie de Buridan, elles