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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/399

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LA COSMOLOGIE DU XVe SIÈCLE

Avec Albert de Saxe, d’ailleurs, Paul admet[1] « que l’existence d’une grandeur infinie n’implique pas contradiction », et, suivant son modèle, il énumère quelques-unes des propriétés surprenantes dont jouirait une telle grandeur. C’est encore la pure doctrine parisienne, telle que l’enseignait Albert de Saxe, que nous reconnaissons au chapitre[2] où Paul de Venise examine si une puissance active a pour terme un maximum où elle puisse encore agir, si une puissance passive a pour terme un minimum où elle ne puisse plus pâtir. « Et d’abord, » dit-il, « notons de quelle manière on expose la question.

» On formule cette proposition : A est le poids maximum que Socrate puisse porter ; Socrate ne peut donc porter ni le poids A ni un poids égal à celui-là ; mais si l’on se donne un poids quelconque, inférieur à A, on pourra trouver un poids que Socrate portera, et qui sera plus grand que celui-ci…

» Ces prémisses posées, voici notre première conclusion : On demande s’il existe un poids maximum que Socrate puisse porter ou un poids minimum qu’il ne puisse porter ; c’est ce poids qui est la puissance de Socrate. » La définition de ce qu’on doit entendre par limite est ici donnée avec une rigueur que les mathématiciens modernes ne dépasseront pas.

L’Averroïste qui avait écrit l’Expositio super libros physicorum s’est mis, pour composer la Summa totius philosophiæ, à l’école des Nominalistes parisiens.


III
le lieu


Nicoletti savait parfois renoncer à son Péripatétisme arriéré pour suivre entièrement la voie tracée par la philosophie des Modernes ; mais, parfois, entre ces tendances diverses, il se partageait ; il tentait de les concilier, de les unir entre elles ; de cette union entre éléments si radicalement hétérogènes sortait alors une doctrine bâtarde et difficile à caractériser ;

  1. Pauli Veneti Op. laud., pars secunda, cap. VII.
  2. Pauli Veneti Op. laud., pars secunda, cap. XIII.