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Après la douce traversée, l’âpre voyage,
Dans ce refuge que vous ouvre ma voix amie,
Que sans crainte votre désir à moi se fie !


Le Jeune Homme

Mon désir…
Oh ! mon cœur tressaille de ses plus anciens souvenirs.
… Lorsque tout à l’heure nous marchions,
Ayant quitté la mer et le navire et que nous approchions,
Les yeux fixés vers ce palais
Où la splendeur d’un midi nouveau apparaissait,
Tout à coup
Dans ce ciel infiniment doux
J’ai vu deux noirs corbeaux, oui, deux corbeaux funéraires
Oui s’envolèrent.
Et maintenant voici
Que ce visage d’enchanteresse nous sourit,
Et que le sombre présage a disparu,
Et que cette voix de fée résonne au fond de moi dans l’inconnu.
Mon désir ?… Oh ! cette parole, reine,
Réveille en moi les choses les plus lointaines,
Quand sur la terre de ténèbres couverte
J’ai quitté celle à qui ma vie était offerte.
Reine, ton visage
Rappelle à ma pensée cette image ;
Ta voix à mon oreille
Sonne pareille
À la voix de celle qui là-bas sommeille ;