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Un moment, on a pu se demander si l’unanimisme n’allait pas exprimer pleinement le besoin de réaction que quelques-uns d’entre nous ressentaient contre ce que j’ai appelé la tentative désespérée de Stéphane Mallarmé.

En eût-il été ainsi, je me hâte de dire que l’unanimisme ne m’aurait pas pourtant donné satisfaction : et cela, parce que je ne renonce aucunement à mes fins symbolistes, parce que, si j’avais pu être attiré vers l’expression immédiate, vers l’expression directe, c’eût été avec la volonté arrêtée de la faire servir à ces fins symbolistes dont ne voulaient pas les Unanimistes.

Mais, à y regarder de près, on s’aperçut que Jules Romains, pour le prendre comme exemple, ne renonçait aucunement à la « tentative désespérée » de n’exprimer, dans la comparaison, que le second terme.

Vous vous souvenez que la tentative désespérée de Mallarmé, c’était de n’exprimer des choses que leur valeur symbolique, musicale et impressionniste. Jules Romains n’a cure du sens symbolique des choses : ce qui le préoccupe, c’est leur valeur, dirai-je impressionniste ?…

J’ai eu avec Jules Romains une discussion amicale au sujet de l’impressionnisme. Jules Romains se défend très vivement de faire de l’impressionnisme. Peut-être le différend ne porte-t-il que sur le mot.

Dans la conférence publiée par Vers et Prose, Jules Romains donne de l’impressionnisme une définition péjorative : il dit que l’impressionnisme, c’est la sensation capricieuse, sans profondeur, le carnet de notes, le petit croquis… S’il en est ainsi, je suis de l’avis de Jules Romains. Mais, si je dis, moi, que l’impressionnisme c’est la sensation profonde, intense, la vision « du dieu » (pour employer sa formule), le tableau d’éternité d’un Manet ?… Jules Romains sera alors de mon avis.

Disons donc qu’il y a impressionnisme et impressionnisme… Impressus, imprimere, cela pourtant ne s’entend pas de quelque chose de superficiel…

Faut-il maintenir le mot d’impressionnisme ?…

Je veux bien toutefois concéder que ce que je dénomme impres-