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la lueur du regard leur révèle la vie. Alors, ils déchargent leur révolver pour éteindre cette veilleuse d’âme qui tremblotte devant une agonie. Voilà ce que c’est.

— Continuez votre récit, je vous prie. Cette femme était donc au milieu du charnier ?

— Oui… elle portait quelque chose sous son manteau ; et, dès qu’elle entendait râler : « Maman ! » elle jetait des objets avec un grand geste de semeur. Quand je lui ai dit : « Madame… à boire, s’il vous plaît ? », elle a fait un signe et m’a lancé des bras de poupées. Ils sont tombés autour de moi comme des graines, pendant qu’elle chantait :

— « Formez des bataillons !… »

Longtemps sa silhouette eut, — sous la lune, — l’incohérence de mouvements d’un épouvantail secoué par la rafale. C’est sans doute parce qu’elle s’était peu à peu mise à hurler :

— « Formez des bataillons ! »

qu’un détrousseur l’a abattue au milieu de la boue. En tombant, elle lançait encore des bras et des jambes de poupées. Il paraît que c’était une folle !

— Oui, dit Jeanne Deckes, mais qui pourra dire à quel moment elle a été le plus folle !

. . . . . . . . . . . . . . . . . .

Cependant, von Keller, qui avait commandé la défense de Vailly était arrivé de Cessière pour vérifier les effets du combat ; et, pendant que la docto-