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IMIRCE OU LA FILLE DE LA NATURE

ne s’en sert que pour avoir une contenance, et cela nous tient lieu d’une vertu qui s’échappe. Je ne voulais point aussi reculer un instant que j’enviais, j’avais pour principe que le plaisir est trop délectable pour être l’auteur du déshonneur.

L’étudiant, choqué des visites de l’employé, prit de l’humeur comme un grand garçon. Un jour, sans faire attention aux égards qu’il me devait, il entra brusquement chez moi, les deux poings sur les hanches et le nez en l’air ; il dit à l’employé : « Vous êtes un manant, monsieur, de venir chez les dames quand les autres y sont avant vous. — Que veut dire ce greluchon, répondit mon amant ? — Je ne suis pas un greluchon, je suis M. Van der Gromac, fils de M. le conseiller Van der Gromac, fils de Van der Gromac. — Eh bien, Monsieur Van der Gromac, fils de M. Van der Gromac, allez-vous en faire… — Savez-vous, répartit l’écolier, que mon père a le bras long ? — Tant mieux, il torchera plus aisément son derrière. — Savez-vous que ma chère mère est une parente à M. l’Aman de notre ville, et que vous êtes un coquin ? » L’employé perdit patience, prit l’étudiant et le jeta par la fenêtre.

Cette chute heureusement ne fut pas mortelle : le fils de M. le conseiller Van der Gromac en fut quitte pour une jambe, deux bras cassés et l’opération du trépan. Les amis du jeune homme portèrent des plaintes contre cette violence ; l’employé fut obligé de se sauver. Comme je n’étais point coupable, le recteur de l’Université de Louvain se contenta de