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ASCANIO.

et quelle est l’heureuse circonstance qui me procure le plaisir de vous voir à pareille heure, maître Georgio ?

— Jésus Dieu ! ce n’est rien, et j’en suis quitte cette fois encore pour la peur. N’ai-je pas été rêver que ces maudites ailes vous étaient poussées ; — mais des ailes immenses, avec lesquelles vous planiez tranquillement au-dessus du château Saint-Ange, en me disant : — Adieu, mon cher gouverneur, adieu ! je n’ai pas voulu partir sans prendre congé de vous, je m’en vais ; au plaisir de ne jamais vous revoir.

— Comment ! je vous disais cela, maître Georgio ?

— C’étaient vos propres paroles… Ah ! Benvenuto, vous êtes le mal venu pour moi.

— Oh ! vous ne me tenez pas pour si mal appris, je l’espère. Heureusement que ce n’est qu’un rêve, car sans cela je ne vous le pardonnerais pas.

— Mais par bonheur il n’en est rien. Je vous tiens, mon cher ami, et quoique votre société ne me soit pas des plus agréables, je dois le dire, j’espère vous tenir longtemps encore.

— Je ne crois pas, répondit Benvenuto avec ce sourire confiant qui faisait damner son hôte.

Le gouverneur sortit en envoyant Benvenuto à tous les diables, et le lendemain, il donna ordre que nuit et jour, et de deux heures en deux heures, on vint inspecter sa prison. Cette inspection dura pendant un mois ; mais au bout d’un mois, comme il n’y avait aucun motif visible de croire que Benvenuto s’occupât même de son évasion, la surveillance se ralentit.

Ce mois, Benvenuto l’avait cependant employé à un terrible travail.