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ASCANIO.

types qu’il cherchait ; mais, comme les ombres retenues en deçà du Styx, il devait se contenter de voir passer dans les champs Élyséens, dont rentrée lui était interdite, ces belles et nobles formes objets constans de son artistique éducation.

Aussi ce que le Primatice avait prévu arriva : Benvenuto passa en revue l’armée de ses modèles sans qu’un seul lui parût réunir les qualités nécessaires à l’œuvre qu’il rêvait.

Alors il fit venir à l’hôtel du cardinal de Ferrare, où il s’était installé, toutes les Vénus à un écu la séance qu’on lui enseigna, mais aucune d’elles ne remplit son attente.

Benvenuto était donc désespéré, lorsqu’un soir, comme il revenait de souper avec trois de ses compatriotes qu’il avait rencontrés à Paris, et qui étaient le seigneur Pierre Strozzi, le comte de l’Anguillara son beau-frère, Galeotto Pico, neveu du fameux Jean Pic de la Mirandole, et comme il suivait seul la rue des Petits-Champs, il avisa devant lui une belle et gracieuse jeune fille. Benvenuto tressaillit de joie : cette femme était jusqu’alors ce qu’il avait rencontré de mieux pour donner un corps à son rêve. Il suivit donc cette femme. Cette femme prit par la butte des Orties, longea l’église Saint-Honoré, et entra dans la rue du Pélican. Arrivée là, elle se retourna pour voir si elle était toujours suivie, et voyant Benvenuto à quelques pas, elle poussa vivement une porte et disparut. Benvenuto arriva à la porte, la poussa à son tour ; la porte céda, et cela assez à temps pour qu’il vît encore, à l’angle d’un escalier éclairé par une lampe fumeuse, le bout de la robe de celle qu’il suivait.

Il arriva à un premier étage ; une seconde porte donnant