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Page:Dumas, Marie - Histoire de mes bêtes, 1878.djvu/191

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HISTOIRE DE MES BÊTES.

Comme le général Drouot ne savait pas plus d’italien que Cambronne, il demandait un interprète en même temps que le rapport.

Le général Cambronne envoya le rapport et Rusconi, l’un portant l’autre, au général Drouot.

Le général Drouot allait se mettre à table.

Il invita Rusconi à déjeuner avec lui ; Rusconi traduirait au dessert le rapport.

Mais il était écrit Là-haut que le rapport ne serait pas traduit.

Les deux convives en étaient au café quand l’Empereur entra.

L’Empereur venait demander le rapport.

— Mais, lui dit Drouot, il est en italien, Sire.

— Eh bien, fit l’Empereur, est-ce que je ne suis pas Corse, moi ?

Il prit le rapport et le lut.

Mais, tout en lisant le rapport :

— Vous avez là du café qui sent bon ! dit-il à Drouot.

— Si j’osais en offrir à Votre Majesté, dit le général.

— Offrez, Drouot ; mais je l’aime chaud, je vous en préviens.

Rusconi se précipita, mit la cafetière d’argent sur des braises rouges, et Napoléon, son rapport lu, eut la satisfaction de prendre une tasse de café bouillant.

Puis il invita Drouot et Rusconi à prendre le leur.

Ils le prirent froid, mais le prirent avec Napoléon.

Voilà comment s’accomplit ce grand événement qui laissa de si profonds souvenirs dans la mémoire de Rusconi.

Rusconi revint en France avec l’Empereur ; mais, après Waterloo, ce fut pour lui une existence à recommencer.