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Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 1.djvu/158

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dit-il, après les avoir fait asseoir tous deux à ses côtés. Cependant rien n’est plus vrai ; encore quelques instants et madame la dauphine sera dans notre pauvre demeure.

— Il faut l’en empêcher à tout prix, ventrebleu ! s’écria le baron ; mais s’il arrivait une pareille chose nous serions déshonorés à jamais ! Si c’est ici que madame la dauphine vient chercher un échantillon de la noblesse de France, je la plains. Mais par quel hasard, dis-moi, a-t-elle été justement choisir ma maison ?

— Oh ! c’est toute une histoire, mon père.

— Une histoire ! répéta Andrée ; raconte-nous-la.

— Oui, une histoire, qui ferait bénir Dieu à ceux qui oublieraient qu’il est notre sauveur et notre père.

Le baron allongea les lèvres en homme qui doute que l’arbitre souverain des hommes et des choses ait daigné abaisser ses yeux vers lui et se mêler de ses affaires.

Andrée voyant que Philippe était joyeux, ne doutait de rien, elle, et lui serrait la main pour le remercier de la nouvelle qu’il apportait et du bonheur qu’il paraissait éprouver, en murmurant :

— Mon frère ! mon bon frère !

— Mon frère ! mon bon frère ! répétait le baron ; elle a, ma foi, l’air satisfait de ce qui nous arrive.

— Mais vous voyez bien, mon père, que Philippe semble heureux !

— Parce que M. Philippe est un enthousiaste ; mais moi qui, heureusement ou malheureusement, pèse les choses, dit Taverney en jetant un coup d’œil attristé sur l’ameublement de son salon, je ne vois rien dans tout cela de bien riant.

— Vous en jugerez autrement tout à l’heure, mon père, dit le jeune homme, quand je vous aurai raconté ce qui m’est arrivé.

— Raconte donc alors, grommela le vieillard.

— Oui, oui, raconte Philippe, dit Andrée.

— Eh bien ! j’étais, comme vous le savez, en garnison à Strasbourg. Or, vous savez que c’est par Strasbourg que la dauphine a fait son entrée.