Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/45

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— Ces grilles sont là dans l’intérêt de votre vie, entendez-vous, Lorenza ?

— Oh ! s’écria-t-elle, il me fait mourir à petit feu, et il me dit qu’il songe à ma vie, qu’il prend intérêt à ma vie !

Balsamo s’approcha de la jeune femme, et avec un geste amical il lui voulut prendre la main ; mais elle, se reculant comme si un serpent l’eût effleurée :

— Oh ! ne me touchez point ! dit-elle.

— Vous me haïssez donc, Lorenza ?

— Demandez au patient s’il hait son bourreau.

— Lorenza, Lorenza, c’est parce que je ne veux pas le devenir que je vous ôte un peu de votre liberté. Si vous pouviez aller et venir à votre volonté, qui peut savoir ce que vous feriez dans un de vos instants de folie ?

— Ce que je ferais ? Oh ! que je sois libre un jour, et vous verrez !

— Lorenza, vous traitez mal l’époux que vous avez choisi devant Dieu.

— Moi, vous avoir choisi ? Jamais !

— Vous êtes ma femme, cependant.

— Oh ! voilà où est l’œuvre du démon.

— Pauvre insensée ! dit Balsamo avec un tendre regard.

— Mais je suis Romaine, murmura Lorenza, et un jour, un jour, je me vengerai.

Balsamo secoua doucement la tête.

— N’est-ce pas que vous dites cela pour m’effrayer, Lorenza ? demanda-t-il en souriant.

— Non, non, je ferai comme je le dis.

— Femme chrétienne, que dites-vous ? s’écria Balsamo avec une autorité surprenante. Votre religion qui dit de rendre le bien pour le mal n’est donc qu’hypocrisie, puisque vous prétendez suivre cette religion et que vous rendez, vous, le mal pour le bien ?

Lorenza parut un instant frappée de ces paroles.

— Oh ! dit-elle, ce n’est pas une vengeance que de dénoncer à la société ses ennemis, c’est un devoir.

— Si vous me dénoncez comme un nécroman, comme un