Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/71

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Bon ! je me rappellerai ces noms-là ; et tu prétends, grâce à ces deux hommes… ?

— M’emparer du présent et saper l’avenir.

— Oh ! oh ! ils sont donc bien bêtes, dans ce pays-ci, qu’ils se laissent mener avec des idées ?

— Au contraire, c’est parce qu’ils ont trop d’esprit que les idées ont plus d’influence sur eux que les faits. Et puis j’ai un auxiliaire plus puissant que tous les philosophes de la terre.

— Lequel ?

— L’ennui… Il y a seize cents ans que la monarchie dure en France, et les Français sont las de la monarchie.

— De sorte qu’ils vont renverser la monarchie ?

— Oui.

— Tu crois cela ?

— Sans doute.

— Et tu pousses, tu pousses ?

— De toutes mes forces.

— Imbécile !

— Comment ?

— Que t’en reviendra-t-il, à toi, du renversement de cette monarchie ?

— À moi rien ; mais à tous, le bonheur.

— Voyons, aujourd’hui, je suis content, et je veux bien perdre mon temps à te suivre. Explique-moi d’abord comment tu arriveras au bonheur, et ensuite ce que c’est que le bonheur.

— Comment j’arriverai ?

— Oui, au bonheur de tous, au renversement de la monarchie, ce qui est pour toi l’équivalent du bonheur général. J’écoute.

— Eh bien ! un ministère existe en ce moment, qui est le dernier rempart qui défende la monarchie ; c’est un ministère intelligent, industrieux et brave qui pourrait soutenir vingt ans encore, peut-être, cette monarchie usée et chancelante ; ils m’aideront à le renverser.