Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 4.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pâle et la suivait sinistrement de l’œil, revint tout à coup à la vie et fit un bond pour se rapprocher d’elle.

— Vous ici, monsieur Gilbert ? dit froidement Andrée.

— Oui, mademoiselle.

— Par quel hasard ?

— Mademoiselle, il faut bien vivre, et vivre honnêtement.

— Mais savez-vous que vous avez du bonheur ?

— Oh ! beaucoup, mademoiselle, dit Gilbert.

— Plaît-il ?

— Je dis, mademoiselle, que j’ai, comme vous le pensez, beaucoup de bonheur.

— Qui vous a fait entrer ici ?

— M. de Jussieu, un protecteur à moi.

— Ah ! fit Andrée surprise, vous connaissez M. de Jussieu ?

— C’était l’ami de mon premier protecteur, de mon maître, de M. Rousseau.

— Bon courage, monsieur Gilbert, dit Andrée en s’apprêtant à partir.

— Vous vous portez mieux ?… Mademoiselle… dit Gilbert avec une voix si tremblante, qu’on devinait bien qu’elle s’était fatiguée en venant de son cœur, dont elle représentait chaque vibration.

— Mieux ? comment cela ? dit Andrée froidement.

— Mais… l’accident ?…

— Ah ! oui… Merci, monsieur Gilbert, je vais mieux, ce n’était rien.

— Oh ! vous avez bien failli périr, dit Gilbert au comble de l’émotion, le danger était terrible.

À ce moment, Andrée pensa qu’il était bien temps d’abréger cet entretien avec un ouvrier en plein parc royal.

— Bonjour, monsieur Gilbert, dit-elle.

— Mademoiselle ne veut pas accepter une rose ? dit Gilbert frémissant et couvert de sueur.

— Mais, monsieur, repartit Andrée, vous m’offrez-là ce qui ne vous appartient pas.

Gilbert, surpris, atterré, ne répliqua rien. Il baissa la tête, et