Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/10

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Aussitôt, une liasse de papiers lui apparut au lieu des machines foudroyantes qu’il redoutait d’y trouver ou des poisons dont l’arôme devait s’exhaler mortellement et priver la France de son magistrat le plus essentiel.

Les premiers mots qui sautèrent aux yeux du lieutenant de police furent ceux-ci, tracés par une main dont l’écriture était passablement déguisée :

« Maître, il est temps de quitter le nom de Balsamo. »

Il n’y avait pas de signature, mais seulement ces trois lettres : L. P. D.

— Ah ! ah ! fit-il en retournant les boucles de sa perruque, si je ne connais pas l’écriture, je crois que je connais le nom. Balsamo, voyons, cherchons au B.

Il ouvrit alors un de ses vingt-quatre tiroirs et en tira un petit registre sur lequel, par ordre alphabétique, étaient écrits d’une fine écriture pleine d’abréviations trois ou quatre cents noms, précédés, suivis et accompagnés d’accolades flamboyantes.

— Oh ! oh ! murmura-t-il, en voilà long sur ce Balsamo.

Et il lut toute la page avec des signes non équivoques de mécontentement.

Puis il replaça le petit registre dans son tiroir pour continuer l’inventaire du coffret.

Il n’alla pas bien loin sans être profondément impressionné. Et bientôt il trouva une note pleine de noms et de chiffres.

La note lui parut importante : elle était fort usée aux marges, fort chargée de signes faits au crayon. M. de Sartine sonna : un domestique parut.

— L’aide de la chancellerie, dit-il, tout de suite. Faites passer des bureaux à travers l’appartement pour économiser le temps.

Le valet sortit.

Deux minutes après, un commis, la plume à la main, le chapeau sous un bras, un gros registre sous l’autre, des manches de serge noire passées sur ses manches d’habit, se présentait au seuil du cabinet. M. de Sartine l’aperçut dans son meuble à glace et lui tendit le papier par-dessus son épaule.