Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 5.djvu/271

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Philippe, je ne suis rien qu’un dévoué serviteur de Votre Altesse.

— Pas colonel, dites-vous ? Et depuis quand ?

— Je ne l’ai jamais été, madame.

— Le roi a promis en ma présence un régiment…

— Dont le brevet n’a jamais été expédié.

— Mais vous aviez un grade…

— Que j’ai abandonné, madame, étant tombé dans la disgrâce du roi.

— Pourquoi ?

— Je l’ignore.

— Oh ! fit la dauphine avec une profonde tristesse ; oh ! la cour !

Alors Philippe sourit avec mélancolie.

— Vous êtes un ange du ciel, madame, dit-il, et je regrette bien de ne pas servir la maison de France, afin d’avoir l’occasion de mourir pour vous.

Un éclair si vif et si ardent passa dans les yeux de la dauphine, que Philippe cacha son visage dans ses deux mains. La princesse n’essaya pas même de le consoler ou de l’arracher à la pensée qui le dominait en ce moment.

Muette et respirant avec effort, elle effeuillait quelques roses du Bengale arrachées à leur tige par sa main nerveuse et inquiète.

Philippe revint à lui.

— Veuillez me pardonner, dit-il, madame.

Marie-Antoinette ne répondit pas à ces paroles.

— Votre sœur entrera dès demain, si elle veut, à Saint-Denis, dit-elle avec la vivacité de la fièvre, et vous, dans un mois, vous serez à la tête d’un régiment ; je le veux !

— Madame, répliqua Philippe, voulez-vous avoir encore cette bonté de m’entendre en mes dernières explications ? Ma sœur accepte le bienfait de Votre Altesse Royale ; moi, je dois le refuser.

— Vous refusez ?

— Oui, madame, j’ai reçu un affront de la cour… Les ennemis