Page:Dumas - La Dernière Année de Marie Dorval, 1855.djvu/59

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lui fit réprimer le cri de terreur qu’elle était prête à pousser en la revoyant.

Elle la regarda d’un air calme et tranquille, et l’embrassa en renfonçant ses larmes et en étouffant.

Dorval se tut jusqu’à ce qu’on fût dans le fiacre.

Arrivée là, elle fixa sur sa fille ses yeux devenus plus grands par la maigreur, plus limpides par l’approche de la mort, et elle lui dit gravement :

— Allons, ma chère enfant, ne fais pas d’inutiles efforts pour cacher tes larmes ; va, pleure, pleure ; pour deux ou trois heures peut-être que j’ai encore à vivre, il ne faut pas te contraindre.

À six heures du matin, elle était réinstallée dans sa chambre.

À onze heures et demie, pendant que je faisais répéter au Théâtre-Français le Testament de César, un garçon de théâtre m’appela dans la coulisse, et me dit comme il m’eût dit la chose la plus indifférente du monde :

— Monsieur Dumas, madame Dorval vous envoie chercher ; elle se meurt, et ne veut pas mourir sans vous revoir.