Page:Dumas - La Femme au collier de velours, 1861.djvu/235

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proie à une hallucination terrible ; il croit jouer… il croit gagner… Quand il a joué et qu’il a gagné, il croit pouvoir posséder celle qu’il aime ; puis, avec son or, il court les rues ; puis il rencontre une femme au pied de la guillotine, puis il l’emmène dans quelque magnifique palais, dans quelque splendide hôtellerie, où il passe la nuit à boire, à chanter, à faire de la musique avec elle ; après quoi il la trouve morte. N’est-ce pas cela qu’il vous a raconté ?

— Oui, oui, cria la foule, mot pour mot.

— Eh bien ! eh bien ! dit Hoffmann, le regard étincelant, direz-vous que ce n’est pas vrai, vous, docteur ? vous qui avez ouvert l’agrafe de diamans qui fermait le collier de velours. Oh ! j’aurais dû me douter de quelque chose quand j’ai vu le vin de Champagne suinter sous le collier, quand j’ai vu le tison enflammé rouler sur son pied nu, et son pied nu, son pied de morte, au lieu d’être brûlé par le tison, l’éteindre.

— Vous voyez, vous voyez, dit le docteur avec des yeux pleins de pitié et avec une voix lamentable, voilà sa folie qui le reprend.

— Comment, ma folie ! s’écria Hoffmann ; comment, vous osez dire que ce n’est pas vrai ! vous osez dire que ce n’est pas vrai ! vous osez dire que je n’ai pas passé la nuit avec Arsène qui a été guillotinée hier ! Vous osez dire que son collier de velours n’était pas la seule chose qui maintînt sa tête sur ses épaules ! Vous osez dire que, lorsque vous avez ouvert l’agrafe et enlevé le collier, la tête n’a pas roulé sur le tapis ! Allons donc, docteur, allons donc, vous savez bien que ce que je dis est vrai, vous.