Page:Dumas - La Reine Margot (1886), tome 2.djvu/53

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— Mais si c’était une femme cependant, nous ne pouvons pas exiger…

— Une femme ?

— Oui.

— Une femme qui a tué deux de vos gardes et qui a blessé mortellement peut-être M. de Maurevel !

— Oh ! oh ! dit le roi, cela devient sérieux. Il y a eu du sang répandu ?

— Trois hommes sont restés couchés sur le plancher.

— Et celui qui les a mis dans cet état ?

— S’est sauvé sain et sauf.

— Par Gog et Magog ! dit Charles, c’était un brave, et vous avez raison, ma mère, je veux le connaître.

— Eh bien ! je vous le dis d’avance, vous ne le connaîtrez pas, du moins par Henri.

— Mais par vous, ma mère ? Cet homme n’a pas fui ainsi sans laisser quelque indice, sans qu’on ait remarqué quelque partie de son habillement ?

— On n’a remarqué que le manteau cerise fort élégant dans lequel il était enveloppé.

— Ah ! ah ! un manteau cerise ! dit Charles : je n’en connais qu’un à la cour assez remarquable pour qu’il frappe ainsi les yeux.

— Justement, dit Catherine.

— Eh bien ? demanda Charles.

— Eh bien ! dit Catherine, attendez-moi chez vous, mon fils, et je vais voir si mes ordres ont été exécutés.

Catherine sortit, et Charles demeura seul, se promenant de long en large avec distraction, sifflant un air de chasse, une main dans son pourpoint et laissant pendre l’autre main, que léchait son lévrier chaque fois qu’il s’arrêtait.

Quant à Henri, il était sorti de chez son beau-frère fort inquiet, et, au lieu de suivre le corridor ordinaire, il avait pris le petit escalier dérobé dont plus d’une fois déjà il a été question et qui conduisait au second étage. Mais à peine avait-il monté quatre marches, qu’au premier tournant il aperçut une ombre. Il s’arrêta en portant la main à son poignard. Aussitôt il reconnut une femme, et une charmante voix dont le timbre lui était familier lui dit en lui saisissant la main :

— Dieu soit loué, sire, vous voilà sain et sauf. J’ai eu