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LA REINE MARGOT.

coups, retentissant dans le silence de la nuit, firent ouvrir les portes de l’hôtel de Guise et sortir quelques têtes par ses ouvertures : on vit alors que l’hôtel était calme à la manière des citadelles, c’est-à-dire parce qu’il était plein de soldats.

Ces têtes rentrèrent presque aussitôt, devinant sans doute de quoi il était question.

— Il loge donc là, votre M. de Mouy ? dit Coconnas montrant la maison où La Hurière continuait de frapper.

— Non, c’est le logis de sa maîtresse.

— Mordi ! quelle galanterie vous lui faites ! lui fournir l’occasion de tirer l’épée sous les yeux de sa belle ! Alors nous serons les juges du camp. Cependant j’aimerais assez à me battre moi-même. Mon épaule me brûle.

— Et votre figure ? demanda Maurevel, elle est aussi fort endommagée.

Coconnas poussa une espèce de rugissement.

— Mordi ! dit-il, j’espère qu’il est mort, ou sans cela je retournerais au Louvre pour l’achever.

La Hurière frappait toujours.

Bientôt une fenêtre du premier étage s’ouvrit, et un homme parut sur le balcon en bonnet de nuit, en caleçon et sans armes.

— Qui va là ? cria cet homme.

Maurevel fit un signe à ses Suisses, qui se rangèrent sous une encoignure, tandis que Coconnas s’aplatissait de lui-même contre la muraille.

— Ah ! monsieur de Mouy, dit l’aubergiste de sa voix câline, est-ce vous ?

— Oui, c’est moi ; après ?

— C’est bien lui, murmura Maurevel en frémissant de joie.

— Eh ! Monsieur, continua La Hurière, ne savez-vous point ce qui se passe ? On égorge M. l’amiral, on tue les religionnaires nos frères. Venez vite à leur aide, venez.

— Ah ! s’écria de Mouy, je me doutais bien qu’il se tramait quelque chose pour cette nuit. Ah ! je n’aurais pas dû quitter mes braves camarades. Me voici, mon ami, me voici ; attendez-moi.

Et sans refermer la fenêtre, par laquelle sortirent quelques cris de femme effrayée, quelques supplications tendres, M. de Mouy chercha son pourpoint, son manteau et ses armes.